X Files (Saison 2)

 X-Files (Saison 2)


La saison 2 d'X-Files marque un tournant majeur dans la vie de la toute jeune série: L'arc mythologique se déploie et avance à grand pas, de nombreux personnages secondaires font leur apparition, tandis que d'autres consolident leur présence à l'écran. En outre, la popularité du show grimpait en flèche.
Voici l'article consacré à la saison 1.

La réussite dans l'adversité


Soyons honnête, la saison 2 aurait pu facilement s'écrouler: En effet, à la fin de la première saison, Gillian Anderson était tombée enceinte, obligeant Chris Carter et son équipe d'établir un plan pour justifier l'absence de l'actrice, en début d'année. La conséquence directe aura été l'élaboration d'une première partie de saison étonnamment sérialisée, que ça soit dans l'arc mythique de la conspiration ou dans les loners. Dans ce long segment, on suit les périples de Mulder et Scully une fois qu'ils ont été muté dans d'autres départements du FBI; jusqu'au moment où le personnage d'Anderson se fait enlever dans un étonnant double épisodes. Cet évènement va non seulement bouleverser l'année à venir, mais également avoir une importance scénaristique cruciale pour le reste de toute la série.
La Fox octroie plus de liberté et surtout un budget nettement plus conséquent pour cette nouvelle fournée d'épisodes, et cela se ressent réellement dans la production. Pourtant, rien n'était gagné d'avance pour Carter car, jusqu'ici, la série bénéficiait principalement d'un succès d'estime. En effet, elle n'avait pas exploser les audiences. Dans un monde parallèle, X-Files aurait pu être un de ces shows arrêtés subitement au terme d'une seule et unique saison. Un univers où The Erlenmeyer Flask aurait conclut brutalement la série. Mulder et Scully auraient été éjecté du département des affaires non-classées, après s'être approchés de trop près de la vérité, et Gorge Profonde aurait été tué. Point final. Heureusement, nous sommes sur Terre 121 et le show connut une multitude de saisons et deux films.
Qualitativement, cette deuxième salves d'aventures se situe nettement au dessus de la première. Malgré l'heureux évènement de Gillian Anderson qui chamboula tout, l'équipe se sentit indubitablement plus à l'aise dans l'écriture et la réalisation. Il y a très peu de morceaux à jeter, même s'il subsiste toujours quelques moments faiblards. Une saison qui va, elle aussi, poser les bases de beaucoup de concepts, notamment dans sa mythologie, mais également en incluant son premier script humoristique.
Il s'agit de la plus longue année puisqu'elle comporte 25 épisodes. Un bon gros bébé, comme celui dans le ventre tout rond de Gillian Anderson.

Personnellement, c'est à partir de cette saison 2 que j'ai commencé à être réellement fan. Un fan obsessionnel qui, lorsqu'il s'ennuyait au collège, s'amusait à écrire tous les noms des épisodes, dans l'ordre. Au fil des années, c'était rigolo car je remplissais des pages, au fur et à mesure que la série gonflait son nombre d'histoires. Hé oui oui oui ! Même que les épisodes mythologiques étaient écrits en rouge et les loners en bleu. Et il y a des élèves qui trouvaient ça impressionnant (ou inquiétant).
C'est à cette époque qu'on a eu droit aux cartes de collection X-Files que je chérissais tant. Je les ai toujours d'ailleurs. Un des rares vestiges de mon passé que j'ai réussi à conserver...
Durant ses prémices, j'étais partagé entre la frayeur et l'attirance. Mais cette peur envers la série s'est peu à peu métamorphosée en fascination.
Voici donc ce que j'ai à dire sur chaque morceaux de cette merveilleuse année.



1. LITTLE GREEN MEN (Les Petits Hommes Verts)

Lorsque j'ai découvert l'épisode, M6 l'avait diffusé à la suite de Roland et The Erlenmeyer Flask, le même soir. Il me semble que c'était lorsque la chaîne proposait la série en prime time, le samedi, dans le programme "Les Samedis Fantastiques". Oui parce que, contrairement à ce que beaucoup de gens pensent, X-Files n'a jamais été diffusé dans la future Trilogie du Samedi. Jamais. Tu peux vérifier. Crois moi. Tu es peut être victime de l'effet Mandela.
Si je te raconte cela, c'est parce que j'avais mis du temps avant de comprendre qu'on était passé à une nouvelle saison, puisque Little Green Men était proposé tout de suite après le cliffhanger de la saison 1. J'avais conscience que ces deux épisodes étaient tendus et qu'ils semblaient importants. X-Files m'avait surtout habitué à ce que Mulder et Scully enquêtent sur des monstres et autres phénomènes paranormaux. Ok, parfois, Mulder voyait une lueur dans le ciel, mais rien de résolument autant dramatique personnellement pour les personnages que ces deux opus (à part peut être Beyond The Sea).
A ce titre, il ne s'agit pas d'une suite directe au final de la première saison. Ce sera une des rares fois où ce sera le cas: Par la suite, toutes les saisons se concluront sur un véritable cliffhanger, avec le bandeau "To Be Continued" à la toute fin. La saison suivante enchaînera temporellement tout de suite sur la suite des évènements. Il n'y aura que la saison 5 et 6 qui feront réellement exceptions, étant donné que le film Fight The Future s'intercalera entre elles. La saison 7 et 8 ne se concluent pas par un "A suivre", mais l'épisode qui le suit relate ce qu'il se passe quasiment juste après. La saison 9 se permet également de ne pas se dérouler juste après les évènements relatés à la fin de la saison 8.
Dans le cas de The Erlenmeyer Flask et Little Green Men, plusieurs semaines séparent les deux oeuvres. En réalité, on pourrait considérer ce dernier comme un nouveau pilot pour la série. Etant donné que la première année n'a pas cartonné en terme d'audience, il était probablement judicieux d'ouvrir la deuxième saison avec une histoire qui revient que partiellement sur les événements récents. On y apprend que Mulder et Scully sont mutés et que leur informateur a été assassiné. Le récit ici se permet même de rappeler le traumatisme de l'enlèvement de la soeur de Mulder. Un parfait rappel pour les nouveaux téléspectateurs. A ce propos, on aperçoit enfin comment s'est déroulé ce terrible drame. Très vite, les fans de l'époque ont remarqué que les souvenirs de Mulder ici diffèrent de ce ceux relatés à la fin de Conduit. Chris Carter souligna malicieusement que les souvenirs sous hypnose régressifs peuvent être altérés. Pratique.

Little Green Men est un épisode mythologique particulier, car il est calme et introspectif, presque même contemplatif. Il dénote par rapport à son prédécesseur qui, lui, en révélait beaucoup tout en maintenant un rythme et une tension soutenus. Mulder fait une crise de foi et ne croit plus en sa quête de la vérité. Il est mal rasé et s'empiffre de graines de tournesol, pendant ses heures de boulot: En effet, désormais, sa tâche est de surveiller des enregistrements, pendant que Scully donne des cours de médecine à des kilomètres de lui. On constate qu'ils ne travaillent donc plus ensemble. L'ambiance est assez crépusculaire et ce sera globalement le ton de toute la première partie de la saison. Il y a quelque chose de déchirant dans le fait que Scully manque terriblement à Mulder. En à peine un an, il s'est tellement attaché à elle que sa quête n'a désormais de sens que si elle se trouve auprès de lui. C'est touchant et désespérant. Il est presque rigolo que les deux se donnent des rendez-vous clandestins dans un parking, comme deux amants qui se voient en cachette. 

Little Green Men parait également insolite, car il est le seul épisode d'ouverture à ne pas avoir été signé par Chris Carter lui même. Ce dernier confia à Glen Morgan et James Wong la tâche de débuter l'année. Pour ces derniers, ce fut l'occasion de tenter d'offrir à David Duchovny son "Beyond The Sea" qu'il avait réclamé au duo de scénaristes. Pour être honnête, Little Green Men est un formidable épisode d'ouverture, mais il n'atteint pas le brio de Beyond The Sea. Il est amusant de constater que Morgan et Wong tentèrent de reprendre des gimmicks propres à Carter, notamment en incluant un monologue de Mulder dans l'introduction. On y retrouve toutes les pensées introspectives et philosophiques qu'auraient pu sortir le showrunner. Mais ces tirades passent plutôt bien ici. Elles collent bien avec le cadre posé du scénario. Little Green Men nous démontre que Mulder est un romantique ayant besoin de sa quête pour donner du sens dans sa vie. Il ne désire pas d'un travail lambda de surveillance. En gros, pas des missions qu'exécutent la plupart des agents du FBI. 
La fin du métrage est déprimant: Après avoir été dans un observatoire à Porto Rico, puis aperçu une silhouette extraterrestre, avant d'échapper à un escadron de la mort, Mulder en revient au même point: Sans preuve, et toujours cantonné à devoir surveiller des communications ennuyeuses. 

L'enquête nous présente pour la première fois le sénateur Matheson, le contact haut placé que Mulder a cité dans le pilot. En outre, Little Green Men nous affiche la première confrontation entre notre héros et L'Homme à La Cigarette, avant que Skinner ne mette ce dernier à la porte. A ce propos, le Smoking Man n'avait pas encore son doubleur français attitré à ce moment là.
Petite note rigolote, c'est la première fois que l'on voit les personnages éclairer un endroit sombre avec une puissante lampe torche. Cette image iconique deviendra une des marques de fabrique les plus connues de la série.
J'adore énormément tout l'arc de ce début de saison 2. Tous les épisodes suivants ont ce point commun, à savoir de distiller une ambiance morose et crépusculaire qui marche du feu de dieu.

2. THE HOST (L'Hôte)

Chris Carter n'est pas content ! Il est ronchon !
Effectivement, l'auteur était d'une humeur massacrante lorsqu'il coucha sur papier The Host. Il a transmis cette irritabilité sur Mulder. En outre, notre showrunner était confronté à des problèmes de vers qu'avait contracté son chien. Un mauvais mood et une expérience répugnante composèrent les ingrédients d'un cocktail parfait à l'élaboration d'un scénario sombre et graphiquement sale. En effet, il y a plusieurs passages cradingues dans The Host, comme l'autopsie effectuée par Scully qui en montre suffisamment pour mettre le spectateur dans une situation inconfortable. Il y a quelque chose de direct et de brutal tout du long: On a affaire à un pur monstre qui n'est même pas spécialement caché. Il y a un crescendo dans ses apparitions corrélé à la mise en scène qui sait ménager son suspense avant de nous dévoiler cette homme douve frontalement. L'épisode nous en montre suffisamment pour qu'on ne puisse pas douter de son existence. Même Scully, lorsqu'elle l'aperçoit dans sa cellule, s'écrit "Oh mon dieu !" à sa vision. Il y a quelque chose d'étonnant dans ce moment où notre sceptique de service se laisse aller à une émotion si "vive" devant un phénomène extraordinaire.
A l'instar de Tooms, la créature de The Host, que tout le monde a appelé tendrement "Flukeman", rejoint les rangs des "monstres de la semaine" les plus célèbres de la série, à tel point qu'il a eu droit à des figurines à son effigie. Il est vrai qu'il a un design résolument marquant, puis combiné au fait qu'il vive dans les égouts suffisent à générer une certaine peur primaire: Le fait qu'il puisse pénétrer le corps et qu'il se tapisse sous nos pieds sont deux éléments provoquant un mélange entre dégout et fascination. De surcroit, il y a deux scènes particulièrement effrayantes: celle de l'employé des égouts qui crache du sang en se lavant les dents. Puis, celle qui voit Flukeman s'introduire dans des toilettes. A ce sujet, j'avais un copain qui ne connaissait que cet épisode, et qui a été traumatisé par cette séquence, en particulier. Il a eu peur d'aller aux toilettes, pendant un moment. 

Un autre parallèle se dresse entre Tooms et The Host: il s'agit clairement de deux loners, mais ils n'hésitent pas à convier plusieurs éléments scénaristique attestant de la continuité de la série. Et ce sera le cas pour les deux épisodes indépendants suivants. Comme mentionné dans mon texte introductif, ce début de saison est étonnamment feuilletonnant. Bien entendu, si Gillian Anderson n'avait pas été enceinte, on aurait probablement eu droit à une démarcation très nette entre loners et mytharc. Le début de cette année aurait été on ne peut plus classique. 
A ce propos, The Host donne un nouveau coup de projecteur au directeur adjoint Skinner. C'est notamment à travers ses scènes que la mauvaise humeur de Mulder se manifeste si ostensiblement. L'oeuvre est également marquant pour avoir introduit le personnage de Mr X, le nouvel informateur de notre bougon agent. On ne le voit pas encore, mais on entend seulement sa voix ici.  

The Host suit la problématique évoquée dans Little Green Men, à savoir que Mulder a besoin de Scully pour s'épanouir dans son travail. Il chérit l'espoir qu'ils soient de nouveaux coéquipiers un jour. Nos deux héros ressentent très clairement de la nostalgie lorsqu'ils se retrouvent ici. La fin offre un cadre assez incroyable d'ailleurs: lorsque les deux personnages se retrouvent, la nuit, assis sur un banc et que Scully montre des images des victimes de Tchenorbyl à son partenaire (une autre source d'inspiration pour l'épisode selon Carter). La scène est vraiment belle et renforce l'aspect crépusculaire déjà diffus dans Little Green Men. 

C'est un certain Darin Morgan qui endossa le costume de Flukeman. Il s'agit du frère de Glen Morgan qui trainait déjà depuis un certain temps sur les plateaux. L'expérience fut amusante selon lui, mais également très contraignante: Il fallut des heures de maquillage tous les jours. L'homme resta dans son costume ensuite, durant très longtemps, sans pouvoir faire ses besoins. Il confessa même avoir uriner dans sa scène finale avec David Duchovny, lorsqu'ils sont tous deux plongés dans les égouts. Hé oui. 
Par la suite, Darin Morgan deviendra scénariste pour X-Files. Et pas n'importe lequel, puisqu'il sera reconnu pour ses scénarios humoristiques. Un sens du décalage et de l'écriture qui fera de lui une des plus épatantes plumes du show. Une étoile filante qui n'aura écrit que quatre oeuvres dans toute la série, lors des saison 2 et 3 (sans compter ses deux écrits pour le revival). A ce propos, lorsque l'auteur revint pour occuper son poste de scénariste, Duchovny ne le reconnut même pas, malgré le fait qu'ils aient tous deux sympathisés durant le tournage de l'épisode.
The Host est encore un formidable segment, bourré d'énergie et qui ose frontalement présenter un monstre peu ragoutant dans ce qui deviendra une des heures les plus emblématiques de l'émission. Deux opus très forts pour débuter l'année: un mytharc et un loner pour démontrer à un nouveau public ce qu'est X-Files.


3.BLOOD (Mauvais Sang)

Troisième épisode et nouveau un chef d'oeuvre. A l'époque, Blood comptait parmi mes petits préférés, et c'est toujours le cas aujourd'hui. Pourtant, Blood n'est pas forcément considéré comme un morceau marquant d'X-Files. Cependant, il est en général placé dans la catégorie "très sympathique"., J'ai toujours été fasciné par le concept des messages subliminaux qui s'affichent sur les appareils électriques. Même s'il subsiste une inconnue sur la façon dont le gouvernement procède pour réaliser concrètement une telle chose, je trouve l'idée brillante. Le pré-générique est à ce titre un petit moment savoureux: lorsque Ed, un employé de bureau fraîchement licencié, voit le message "Kill'em all" s'afficher sur son cadran de travail. 
Le principe d'exacerber les phobies des habitants d'une petite ville, via un pesticide toxique, est une autre chouette idée pour générer la peur et la paranoïa chez le spectateur. Cependant, le récit est volontairement nébuleux: Finalement, nous ne sommes même pas sûr que ce soit le produit qui rend ces gens autant agressifs. Lorsque Ed Funch regarde la télévision dans un centre commercial, il voit plusieurs images violentes. Ensuite, en tournant sa tête, il aperçoit un panneau lumineux qui indique un rayon de vente d'armes. Il y a quelque chose d'anxiogène dans ces lieux publics les plus communs. Il n'y a malheureusement rien de surnaturel à tout ça. Justement, mise à part le mystère autour des messages subliminaux, Blood ne présente pas véritablement de phénomènes paranormaux. C'est une histoire cynique sur une montée soudaine de violence, au sein d'une petite communauté habituellement paisible. L'horreur qui s'immisce donc dans le quotidien de pauvres gens.
Le climax qui voit Funch monter une tour, puis tirer au fusil sur des pauvres gens, évoquent irrémédiablement les tueries qui se sont déroulées aux Etats-Unis. La scène est impressionnante et William Sanderson, qui campe l'ex employé de la poste, est impeccable dedans. Il joue parfaitement son rôle de pauvre citoyen qui pète lentement un câble, tout le long du métrage. Petite anecdote amusante: lorsque la bénévole de la collecte du sang semble appuyer plusieurs fois sur la sonnette de Funch, c'est le mot "Blood" qui est "joué" en morse.

Glen Morgan et James Wong ont écrit le scénario. Ils désiraient concevoir quelque chose autour d'un employé de poste, mais aussi d'une trame incluant des pesticides. Darin Morgan, qui venait tout juste de jouer Flukeman de The Host, suggéra l'idée que le travailleur pourrait devenir fou après avoir reçu des messages subliminaux. Glen Morgan voulait injecter sa propre hématophobie dans un épisode. Ce sera donc le personnage d'Ed Funch qui héritera de cette caractéristique. Même s'il s'agit principalement d'un scénario du fameux duo Morgan/Wong, on retrouve quelques idées propres que l'on retrouvera dans les scripts de Darin Morgan: à savoir que Fox Mulder n'est peut être pas un être si équilibré que cela. Dans Blood, même si l'agent pourrait avoir raison, il se fait passer pour un paranoïaque aux yeux des autorités locales, et même aux yeux de Scully qui ne peut pas aisément prouver qu'il a raison. Et puis, cette chute finale, qui voit le personnage recevoir lui même des messages subliminaux sur son téléphone, ne rassure pas sur son état de santé mental.
Cependant, Blood possède malgré tout la marque de Glen Morgan et James Wong. Et comme à l'accoutumée avec eux, il offre un beau rôle à Scully, malgré le fait qu'il s'agisse principalement de Mulder en action ici. Déjà, c'est une histoire où elle ne semble pas totalement à côté de la plaque, lorsqu'elle contredit son partenaire, notamment grâce au caractère nébuleux de l'enquête. De plus, l'épisode insinue que la méfiance de Mulder ne le rend pas spécialement sympathique auprès de son entourage, tandis que Scully se montre plus conciliante. Toute cette première partie de saison nous suggère ce qu'est un monde dans lequel Mulder doit faire le plus gros du travail, sans sa partenaire. Et on constate qu'il y arrive moins bien seul. Il semble évoluer avec une béquille. Dans The Host, il a dû mal a tempérer ses tensions avec Skinner, par exemple.
Forcément, à l'instar des derniers épisodes diffusés, il fallait limiter le plus possible Gillian Anderson de l'écran, car sa grossesse commençait à beaucoup trop se voir. Ceci explique pourquoi Scully opte pour de gros manteaux bien longs, ces derniers temps. Les réalisateurs devaient la filmer plus ou moins cachée, en gros plan et de préférence assise, lorsque cela était possible.
Blood continue donc d'enrichir un début de saison sans faute jusqu'ici.



4. SLEEPLESS (Insomnies)

Sleepless est encore un épisode remarquable. Comme dans les meilleures pizzas, les différents éléments qui le constituent se marient merveilleusement bien. Tout d'abord, cette histoire de vétérans du Vietnam privés de sommeil, suite à une malheureusement expérience militaire, est fascinante. En effet, voir ces malheureux sombrer et errer comme des zombies, car ils n'ont pas pu dormir depuis 24 ans, est une évocation très angoissante. 
Il y a quelque chose également de fascinant dans la raison et les capacités des pouvoirs d'Augustus Cole: Que sa privation de sommeil lui octroie le pouvoir de matérialiser ses rêves dans le monde réel est une idée séduisante. A ce propos, Tony Todd est tellement convaincant dans ce rôle de vétéran désabusé et meurtri. Il rejoint aisément les rangs des prestigieux acteurs qui sont venus dans la série. Citons également Jonathan Gries qui joue lui aussi un de ces malheureux ex-soldats.
Les traumatismes de la guerre du Vietnam seront plusieurs fois abordés dans la série. Bien entendu, X-Files dresse un portrait peu reluisant sur cette guerre et sur les répercussions qu'elle a eu. Sleepless met en lumière certaines horreurs que les soldats présents dans l'épisode ont commis au Vietnam, avant de les dépeindre comme des vétérans qui semblent avoir été abandonné par leur propre pays. Ils errent comme des âmes en peine, en proie avec leur stress post-traumatisme.
Une autre réussite de Sleepless réside dans sa surprenante réalisation: Rob Bowman rempile après son merveilleux travail sur Gender Bender de la première saison, et il met les bouchées doubles ici. L'épisode est visuellement très élégant conjugué par une lumière impeccable: Une bonne partie du métrage plonge les personnages dans la pénombre, dans une atmosphère nocturne mélancolique. Certains lieux semblent presque éthérés. Un parfait parallèle avec ces soldats incapables de rêver.

A l'instar de The Host et Blood, Sleepless a beau être un loner, il fait tout de même avancer le fil rouge du show, notamment en affublant Mulder d'un nouveau coéquipier: l'enthousiaste Alex Krycek, un protagoniste qui deviendra incontournable dans l'univers d'X-Files. A ce titre, la dynamique entre Mulder et Krycek fonctionne très bien. Ce nouveau personnage a beau être présenté comme un nouveau partenaire, sa dynamique accentue les tensions sexuelles entre Mulder et Scully. Plus précisément, on a parfois l'impression que Krycek est le nouvel intérêt romantique de Mulder, attisant un peu la jalousie de Scully. Il y a cette scène dans laquelle la jeune recrue semble furieux lorsque son nouveau partenaire lui pose un lapin. Ensuite, Scully semble préoccupée au téléphone, lorsqu'elle confie à son ancien collègue que Krycek a l'air d'être efficace. Oh ! J'allais oublier cette délicieuse saynète dans laquelle les deux anciens équipiers/amants tiennent Krycek à distance lorsqu'ils discutent ensemble. 
Ce sous texte entre les deux hommes alimentera une frange du fandom de la série, à tel point que certains fans s'amuseront à imaginer une relation amoureuse entre eux. La Mulder/Krycek Romantics Association aura été un lieu où les fanfictions entre les deux personnages pouvaient s'épanouir. Chris Carter et son équipe étaient au courant de ces fantasmes, et le baiser que Krycek offre à Mulder dans The Red And The Black (saison 5) sera une réponse à tous ces délires. Un autre exemple du lien unissant les créateurs et les fans de la série (comme je l'ai relaté sur mon petit texte sur EBE).

Sleepless nous présente également la première rencontre entre Mulder et Mr X, le nouvel informateur... qui aurait dû être une informatrice, mais suite aux essais jugés insuffisants avec l'actrice choisi, Glen Morgan et James Wong suggéra Steven Williams comme remplaçant. Ils avaient déjà bossé ensemble sur 21 Jump Street.
Il s'agit du premier scénario écrit par Howard Gordon en solo, sans son comparse de toujours: Alex Gansa. Notre auteur a tellement stressé de travailler seul qu'il en a fait des insomnies. Cette condition inconfortable a posé les bases de son intrigue. La conclusion de l'épisode est également remarquable, car elle préfigure l'enlèvement de Scully qui arrivera d'ici peu. A ce titre, la petite apparition de L'Homme à La Cigarette est saugrenu en français, car les comédiens de doublage se sont emmêlés les pinceaux. En effet, ce dernier parle avec la voix de Skinner, et c'est assez déroutant.


5. DUANE BARRY (Duane Barry Partie 1)

Duane Barry marque plusieurs tournants dans la série. Tout d'abord, il s'agit du premier épisode mythologique a se scinder en deux parties. Cette manière de procédé deviendra une constante au fil de la plupart des saisons: En effet, chaque année commencera et se clôturera sur du mytharc, puis intégrera deux autres histoires mythologiques en deux parties. La saison 2 est celle qui consolide cette structure narrative. Il y aura quelques petites exceptions comme un mytharc surprise dans les saisons 4,7 et 8 (Memento Mori, En Ami et Vienen) et une série de quatre épisodes en saison 8 (Per Manum, This is Not Happening, Dead Alive et Three Words).
Deuxièmement, Duane Barry est le premier opus réalisé par Chris Carter. Et il révèle ici un nouveau talent caché: J'ai beaucoup critiqué les premiers scénarios de l'artiste sur la première saison (même s'il se rattrape bien sur ses derniers), mais sa virtuosité de metteur en scène demeurent indéniables. Il est même stupéfiant que son premier coup d'essai soit une aussi belle réussite. Dès le pré-générique, Carter filme sa séquence d'enlèvement de Duane Barry avec brio, avec cette caméra qui déambule dans cette maison, conférant un aspect voyeurisme à la scène. Et tous les passages dans l'agence, avec le personnage éponyme, Mulder et les autres otages sont visuellement saisissants. Notre showrunner a bénéficié des bons conseils du réalisateur David Nutter, qui l'épaula tout le long de la conception du métrage.

On retrouve à nouveau ici l'empathie de Mulder envers les malheureuses victimes d'enlèvements. Bon, même si ici Duane Barry prend en otage de parfaits innocents, Mulder veut tout de même en savoir plus et, en tentant de le raisonner pour gagner du temps, on sent véritablement qu'il compatit à la souffrance du ravisseur. Il y a longtemps, j'avais lu un long papier qui décrivait Duane Barry comme un Fox Mulder qui aurait dérapé. Effectivement, lui aussi a été agent du FBI avant qu'un évènement le fasse vaciller. Les anciens collègues de ce dernier trouvent qu'il a vraiment changé depuis qu'il est dans le département des X-Files, combiné à son hypnose régressive, dans laquelle il a pu retrouver les souvenirs de l'enlèvement de sa soeur. Cette première partie de saison revient sans arrêt sur le fait que Mulder n'est plus rien sans Scully. Qu'il a besoin d'elle pour parfaire son travail. Maintenant, que se passerait-il si elle venait à disparaitre ? Deviendrait-il une sorte de Duane Barry ?
A ce niveau précis du fil rouge, la série joue encore de nos attentes, et peut toujours se permettre de distiller le doute quant à l'existence des extra-terrestres. Dans cet ordre d'idées, on peut vraisemblablement se dire que Duane Barry affabule et qu'il n'a pas vraiment été enlevé par des aliens. Ou peut-être s'agit-il d'une partie de la vérité et qu'il a été enlevé par des membres du gouvernement ? Quel était la nature du flash de lumière que l'on aperçoit à l'extérieur de l'agence ? Il y avait quelque chose d'excitant à injecter ce genre d'incertitudes, lors des balbutiements mythologiques.

J'adore l'aspect thriller de prise d'otages. J'ai toujours apprécié ce cadre scénaristique. La série s'essaiera une nouvelle fois à ce format via le magnifique Folie A Deux, à la fin de la saison 5. Duane Barry est un épisode constamment sous tension, et on ressent réellement que Mulder et ses collègues sont sur le fil du rasoir, et qu'à la moindre phrase mal placée, le ravisseur peut vaciller.
On retrouve de nouveau Alex Krycek en tant que coéquipier de notre héros. A ce propos, il n'est certainement pas innocent que la première rencontre entre les deux protagonistes se fasse à la piscine: lorsque le premier vient discuter avec le second, qui lui sort de sa baignade en maillot de bain. Chris Carter titille-t-il les fans qui fantasment sur une quelconque relation romantique entre eux ?
Comme à l'accoutumée, Dana Scully est absente une grande partie du métrage, laissant la part belle à son ancien équipier. 

Duane Barry a été très apprécié au sein de l'équipe, et l'épisode fut de nombreuses fois nominés, notamment dans les catégories "meilleure photographie", "meilleure réalisation", mais aussi "meilleure acteur/actrice invité(e)" pour l'actrice CCH Pounder. Saluons également l'excellente prestation de Steve Railsback dans le rôle du désespéré et dangereux Duane Barry. Vraiment un excellent segment et probablement un des meilleurs opus mythologique de toute la série.


6. ASCENSION (Duane Barry Partie 2)

Suite directe de Duane Barry, Ascension s'apparente à une course contre la montre: Mulder doit se dépêcher d'empêcher le personnage éponyme de livrer Scully aux aliens (ou au gouvernement). La dynamique est donc totalement différente de la première partie qui revêtait les atours de thriller atmosphérique résolument intimiste. Tandis qu'Ascension est un métrage dense qui passe très vite, tout en s'appuyant sur de vastes environnements. Le pic du récit se situant bien évidemment dans cette fameuse scène dans laquelle Mulder est suspendu à un téléphérique. Une cascade réalisée par David Duchovny himself. Cela deviendra une habitude: l'acteur effectuera toutes les cascades au fil de la série.
Il se passe beaucoup de choses au cours de ces 45 minutes: Scully se fait finalement enlever. Duane Barry est tué rapidement ensuite. Krycek est démasqué. Puis, Skinner se rallie à Mulder et décide de rouvrir les X-Files. Il ne faut pas cligner des yeux trop longtemps ici. L'épisode est d'une telle efficacité. Carter cède sa place de réalisateur à Michael Lange, qui exécute ici un excellement travail.

La trahison révélée de Krycek est intéressante car elle remet le couvert sur l'ambiguïté de Mulder. Ce dernier scande à tout va qu'il ne faut faire confiance à personne mais, paradoxalement, l'homme a irrésistiblement besoin d'accorder sa confiance à certaines personnes, et très vite. C'est le cas avec l'agent double ici: Malgré les crasses et les cachoteries que notre héros envoie à son nouveau partenaire, Mulder lui fait facilement confiance au terme de Sleepless.
Il y a un passage qui semble parfaitement ironique sur cette contradiction: lorsque notre héros claque la porte d'une réunion du FBI à laquelle il était convié, puis déclare à ses supérieurs que "peut être qu'il a du mal à faire confiance à qui que ce soit". Ensuite, la scène suivante, l'agent demande à Krycek s'il peut emprunter ses clefs de voiture.
A ce titre, j'aimais beaucoup la dynamique entre ces deux personnages. Dommage que la série n'ait pas réutiliser cette relation pour quelques épisodes supplémentaires. On se doute que l'équipe créatrice voulait au plus vite rétablir  le statu quo Mulder/Scully, par peur de trop changer la dynamique centrale de la série.

Comme tout cet arc de saison 2, Ascension est une oeuvre entièrement dédiée à Mulder, malgré le fait que le sujet de l'intrigue soit Scully. Ici on voit le personnage courir pour tenter de secourir sa collègue. On le voit démuni et désespéré. Il semble être abandonné par tout le monde: Mr X ne lui est d'aucun secours, ni même le sénateur Matheson. Et Krycek se révèle être un traitre aux services de l'Homme à La Cigarette. Heureusement, il trouve un léger réconfort auprès de Skinner, à la toute fin. Il console également la mère de Scully, par le biais de saynètes qui fonctionnent vraiment bien d'ailleurs: Que Mme Scully se confie si aisément à notre héros est touchant. L'épisode souligne bien le désespoir de Mulder, notamment à travers cette magnifique scène finale qui voit le personnage, perdu à contempler le ciel nocturne. A l'époque, les spectateurs américains ont dû être accroché à leur siège, à ce moment précis, avant de prendre leur mal en patience, et attendre toute une semaine avant de voir la suite... Par ailleurs, Ascension aurait pu constituer un excellent cliffhanger de fin de saison.
Pour l'anecdote, c'est grâce à une lettre d'un fan que Carter eut l'idée d'élaborer de grands arcs mythologiques, qui non seulement abordaient le grand complot, mais s'intéressaient plus à nos deux héros. Dans ce courrier, la personne expliquait qu'elle préférait les épisodes qui plaçaient Mulder et Scully au centre, où l'on en apprenait davantage sur eux, sur leur vie, plutôt que les histoires exclusivement procédurales, ne traitant que des enquêtes elles même.


7. "3" (Les Vampires)

Ouch ! Il fallait bien un gros raté pour casser l'excellence de ce début de saison. Pourtant, le postulat aurait pu donner du corps à cet épisode: notamment en explorant la dépression de Mulder, pendant la disparition de son équipière. La réalisation de David Nutter n'est pas si mal, même si elle alloue un côté "Hollywood Night" à toute cette histoire de vampires. Malheureusement, le métrage est tellement mou du genou et l'intrigue peine à décoller véritablement. Le scénario a été écrit dans la confusion. A l'origine, c'est Howard Gordon qui aurait dû écrire l'épisode 7, mais il était indisponible à ce moment là. James Wong et Glen Morgan ont donc accepté de réécrire une partie d'un script écrit par Chris Ruppenthal. Notre duo de scénaristes avaient pourtant l'air convaincu par le déroulé en lui même, mais le résultat à l'écran fut très décevant.
En outre, la production a dû être compliqué car déboussolée par la totale absence de Gillian Anderson, pendant toute la durée de l'épisode. En effet, il s'agit du premier opus où une des deux stars principales n'apparaît pas à l'écran. Ce ne sera pas la dernière, mais on sent que l'équipe de Chris Carter sera plus à l'aise à retirer ponctuellement l'un ou l'autre, sur divers récits ultérieurs, lorsque l'émission s'essayera davantage aux expérimentations. Dans ce cas précis, X-Files était encore une jeune série, et même si ce début de saison paraît expérimental en soi, le fait d'effacer un des deux protagonistes étaient probablement de trop. Bien sûr, cela n'explique pas l'échec cuisant du métrage. Les faux pas, ça arrive et surtout sur une série aussi massive et éreintante que X-Files.

"3" fonctionne surtout comme un parenthèse purement atmosphérique. C'est un morceau de télé assez lent, comme pour souligner la tristesse et la morosité de Mulder. Le cadre du feu d'incendie à Los Angeles, qu'on aperçoit parfois au loin, octroie une ambiance vraiment spécifique à l'ensemble. Il y a comme un parfum d'urgence lointaine qui émane de tout ce récit. Ensuite, toute cette histoire d'un trio de vampires qui sèment la terreur aurait pu être intéressante, mais elle a tendance à plutôt trainer en longueur. La sous intrigue amoureuse entre Mulder et Kristen (interprétée par Perrey Reeves qui était la petite amie de Duchovny à l'époque) n'est pas une mauvaise idée en soi, en plus d'en rajouter sur le caractère romantique de la relation entre nos deux agents. Assurément, le fait qu'il se laisse aller dans les bras d'une autre femme, pendant que Scully n'est plus là, est clairement un signe qui va ce sens: "3" considère l'enlèvement du personnage comme étant la fin d'une relation amoureuse.
La médiocrité de l'ensemble saute d'autant plus aux yeux que ce segment s'intercale malencontreusement entre deux mytharcs majeurs: Ascension et One Breath. Il hérite de la tâche ingrate d'établir le lien entre deux périples palpitants sur l'enlèvement de Scully. Le spectateur peut en avoir rien à foutre à ce niveau là d'avoir un loner plutôt banal. Il veut savoir la suite de l'intrigue principale. Pour le coup, dommage que "3" ne se contente de n'être qu'une parenthèse peu reluisante. L'absence de Scully aurait pu donner quelque chose d'incroyable, comme une introspection plus poussée de l'agent Mulder. Au final, on n'a affaire qu'à une insipide histoire de vampires modernes, avec un type qui tire la gueule tout du long. C'est évidemment trop léger, et on a l'impression d'être en présence d'une occasion manquée.
L'épisode compte parmi les mal aimés des fans: Une partie n'a pas du tout apprécié que Mulder tombe soudainement amoureux de Kristen. En outre, cet opus souligne de nouveau l'inconfort des scénaristes lorsqu'il s'agit d'ancrer un scénario autour d'une créature mythique et connue.
Pauvre David Nutter qui se retrouve encore une fois à soutenir un épisode médiocre. Heureusement qu'il est là pour au moins apporter plus de caractère à une histoire totalement osef.



8. ONE BREATH (Coma)

Nous revoici enfin de plein pieds dans la mythologie. One Breath arrive à tant pour boucler l'arc de l'enlèvement de Scully, initié par Duane Barry. Si on détache "3" du lot, on tient là un morceau massif du fil rouge, à travers une trilogie d'épisodes: Duane Barry, Ascension et One Breath. Et les trois segments sont exemplaires dans ce qu'ils entreprennent, en plus d'être remarquablement singuliers les uns par rapport aux autres.
One Breath est étonnamment doux et émouvant. Bien sûr, le retour de Scully, mais plongée dans le coma, est une parfaite occasion d'offrir un surplus d'émotion à la mythologie. Mais on aurait pu avoir juste une ou deux scènes émouvantes mais, au lieu de ça, c'est tout le métrage qui baigne dans une atmosphère mélancolique, presque éthérée. Les moments de "rêves" de Dana soutiennent cette imagerie, mais les séquences impliquant Mulder, dans sa quête de réponses, bénéficient également de cette étrange ambiance. Malgré le désespoir qui plane autour du récit, One Breath est admirablement optimiste. Le côté paranormal ici est décrit positivement. De l'aveu des deux scénaristes Glen Morgan et James Wong, l'épisode apporte un peu de lumière, car la série est habituellement tellement sombre et déprimante. A ce sujet, ils ont écrit le script consciemment pour offrir à Duchovny son "Beyond The Sea" à lui. C'était déjà une tentative en germe dans Little Green Men, mais là, ils ont vraiment signé One Breath dans cette optique. Et Duchovny démontre pleinement ses talents d'acteur ici. La scène dans laquelle il craque chez lui, après s'être fait cambriolé par des hommes du gouvernement, est bouleversante. Son regard déprimé lorsqu'il veille sur sa partenaire fait mouche également. X-Files a beau être une oeuvre pessimiste et cynique, elle prouve aussi qu'il y a de la place pour l'espoir et l'optimisme. A ce titre, on pourrait voir Mulder et Melissa, la soeur de Scully, comme les incarnations de ces deux facettes opposées: Le premier est cynique et déprimé, tandis que la seconde est porteuse de lumière et croit en des forces spirituelles positives. Elle même reproche à l'agent son comportement. Elle estime que positiver n'est pas synonyme de stupidité.
Chaque semaine, nos deux héros ont beau mettre le doigt sur un effroyable complot, ainsi que mettre en lumière les horreurs perpétuées par des créatures surnaturelles, l'histoire ici démontre que tout cela peut être contrebalancé avec des choses merveilleuses.

One Breath a beau être lumineux, malgré son sujet difficile, il distille quelques scènes assez implacables, notamment en présentant une facette froide du nouvel informateur, Mr X: Pour couvrir ses arrières, il n'hésite pas à abattre froidement un homme dans un parking. Il se présente donc comme à l'opposée de Gorge Profonde. Ce dernier était une figure paternelle rassurante. X, lui, a l'air de se servir de Mulder pour ses propres intérêts, et il le fait savoir à ce dernier. Il est un homme violent et peu fréquentable. On apprend jamais grand chose à son sujet, mais on peut aisément supposer qu'il est largement moins gradé que son prédécesseur, au sein du gouvernement. Il ressemble plus à un homme de main qui exécute la sale besogne. Steven Williams est impeccable dans ce rôle, et d'avoir un nouvel informateur aussi différent octroie une dynamique totalement inédite. 
L'épisode se permet même de donner de l'épaisseur à d'autres personnages secondaires: Tout d'abord Skinner qui s'ouvre étonnamment à Mulder, lorsque ce dernier annonce sa démission, débouchant sur un instant culte dans laquelle le directeur adjoint se confie, en racontant le traumatisme qu'il a subit à la guerre du Vietnam. La séquence est un long monologue, dénuée de musique, mettant en avant l'acting de Mitch Pileggi. Un des moments les plus emblématiques de la série. Après sa saynète dans laquelle il indique à l'Homme à la Cigarette qu'il n'est clairement pas le bienvenue dans son bureau, on peut considérer à ce niveau du fil rouge que Skinner est définitivement un allié de nos deux agents.
Ensuite, On a droit à une scène musclée entre Mulder et le Cigarette Smoking Man, lorsque le premier pointe une arme sur le deuxième. Cette confrontation offre une couche d'épaisseur (comme le papier toilettes) supplémentaire dans la relation entre les deux hommes: Mulder pénétrant dans l'intimité de cet homme de l'ombre. Le grand antagoniste paraît ici nettement plus vulnérable. Absolument tout le monde brille dans ce métrage, et permet à tous ces personnages de s'humaniser. On a même droit à Frohike en smoking qui vient rendre visite à Scully, à l'hôpital. Une courte saynète assez touchante. Même l'introduction avec Scully enfant, qu'on pourrait trouver à côté de la plaque et mièvre, est une jolie façon de débuter l'épisode.
One Breath est un superbe moment qui vient clore l'arc de l'enlèvement de Scully. Et plus globalement, il referme cette longue et étrange parenthèse du début de la saison 2. Un arc surtout axé sur le personnage de Duchovny, au détriment de celui d'Anderson. Heureusement, la suite de la série offrira de nombreux segments sur cet autre partie du binôme.


9. FIREWALKER (Intraterrestres)

J'aime beaucoup Firewalker. Il n'est jamais considéré comme spécialement mauvais, mais il est rarement cité parmi les moments inoubliables de la série. Mais je trouve qu'il fait du super boulot, compte tenu de la tâche ingrate de passer après un arc aussi passionnant que Duane Barry. L'affaire réintègre Scully à sa place habituelle et rétablit le statu quo initial du show. On se retrouve à nouveau avec "Mulder et Scully vont enquêter sur des affaires étranges". On aura tout de même attendu neuf épisodes avant que la saison 2 remette les pendules à l'heure. Malheureusement, il est assez délicat de passer après un évènement aussi important que l'enlèvement de Scully, sans le mentionner dans ce loner. On a donc ici un des rares cas d'épisode isolé qui relate ce qui s'est passé dans le grand arc mythologique: En effet, au début de l'affaire, Mulder s'inquiète au sujet de sa coéquipière, et lui demande si elle est bien prête à recommencer à travailler. Manque de bol, ils vont être plongés dans une enquête dangereuse qui va les placer face à la mort.
Firewalker réutilise le trope des personnages bloqués dans un lieu hostile, à l'instar de Darkness Falls et Ice. Mais je trouve qu'il exploite plutôt bien son idée ici. Le décor est plutôt original: la station aux alentours d'un volcan offre un cadre suffisamment anxiogène et étouffant. On ressent vraiment la chaleur dans ce décor, et l'ambiance dépeinte ici agit en négatif à celle présentée dans Ice: La chaleur du volcan remplaçant le froid de l'arctique. Mais les similitudes entre ces épisodes a justement été pointé du doigt par certains fans, ainsi que James Wong lui même, le coscénariste d'Ice. L'artiste voyait d'un mauvais oeil que la série commence à se cannibaliser si tôt dans sa courte vie. Il s'agit ici du second script de Howard Gordan en solo. Et malgré les ressemblances avec Ice ou Darkness Falls, je trouve l'affaire plutôt complémentaire, et permet même d'intégrer le scientifique Daniel Trepkos, une figure miroir de Mulder. En effet, la soif de vérité de Trepkos finit par le consumer et sa découverte va avoir de graves conséquences. L'homme finit au bord de la folie. Il pourrait tout aussi bien s'agir de notre héros. Gordon lui même a construit ce personnage de scientifique pour créer une proximité avec notre agent. Avoir placé Firewalker juste après One Breath semble judicieux, ne serait-ce parce que Mulder reconnait à Trepkos, lors d'un point culminant, que le prix a payer pour la vérité est peut être trop élevé. Evidemment, il déclare ceci par rapport aux événements relatés dans cette enquête, mais on ne peut s'empêcher de dresser un parallèle avec la propre quête de vérité de l'agent, qui a bien failli coûter la vie de sa partenaire. Pour renforcer l'effet miroir, Trepkos a emmené avec lui sa stagiaire, Jesse O'Neil, qui paiera le prix de la quête de ce dernier. Elle représente un dommage collatéral terrible. Peut être comme Scully pour Mulder ? Lors du climax, les deux femmes se retrouvent enchaînées l'une à l'autre, via des menottes. Sauf que Jesse périra, tandis que Scully brisera ses chaînes pour retrouver la liberté. Un destin probablement plus heureux qui se profile pour cette dernière.
Je trouve que le scénario de Howard Gordon est victime d'un mauvais procès: Si on dépasse le cadre de l'intrigue, qui renvoie irrémédiablement à Ice, les deux oeuvres s'affranchissent thématiquement l'une de l'autre.

Par ailleurs, j'appréciais que la réelle menace n'arrive que tardivement. Au début, on nous donne l'impression que nos deux agents vont devoir affronter une créature vivant au sein même d'un volcan, pour finalement bifurquer, et révéler que le danger provient de spores mortelles. Des champignons qui, une fois arrivés à maturation dans le corps de leur victime, explosent le cou de ces dernières afin de sortir tranquilou. Un "monstre de la semaine" parmi les plus répugnants qui soit. A ce titre, on doit ce chouette travail à Toby Lindala, le maquilleur de la série, qui a déjà tant apporté depuis le début du show. Dernièrement, c'est son Flukeman qui lui a valu la reconnaissance.
Histoire d'appuyer le parallèle avec ses deux sources d'inspiration, Firewalker reprend les motifs musicaux d'Ice et de Darkness Falls, comme si même Mark Snow avait compris qu'il s'agissait ici d'une continuité logique de ces deux opus.
Comme toujours, David Nutter contribue beaucoup à la réussite du métrage: La mise en scène est plutôt impressionnante, et compte parmi le haut du panier jusqu'ici. Pour parfaire le tableau, le casting est encore une fois impeccable, avec les invités Leland Orser, Shawnee Smith et Bradley Whitford. Le récit arrive pleinement à tous les mettre en valeur. Chacun bénéficie de quelques scènes importantes à leur actif.

Firewalker est un très bon épisode. Son principal problème réside dans la place chronologique qu'il occupe dans la saison: Il doit passer après un immense arc qui s'ouvrait avec Little Green Men et qui se finissait de manière explosif avec One Breath. Le retour à la normal semble donc rude. Je suis sûr que s'il avait été diffusé plus tard, la réception critique aurait pu être différente. Je continuerai à défendre Firewalker ! T'entends ??


10. RED MUSEUM (Le Musée Rouge)

Red Museum pose problème. Il ne s'agit pas d'un épisode catastrophique. Très loin de là. Il est même plutôt sympathique. Mais il souffre de gros problèmes de production.
A l'origine, l'intrigue ici aurait dû nourrir un ambitieux cross over avec la série Picket Fences, diffusée à la même période sur la chaîne CBS. Grosso modo, les spectateurs auraient commencé à regarder Red Museum sur la FOX, avant de devoir zapper sur CBS, et ensuite voir la conclusion de l'enquête, mais au sein de Picket Fences. En fin de compte, cette dernière chaîne refusa de voir concrétiser cette idée. Elle n'a pas voulu faire la publicité pour X-Files. En résulte finalement deux épisodes séparés: Un restant dans le carcan d'X-Files et l'autre cantonné à Picket Fences. Il n'y aura donc aucun lien entre les deux séries. Chris Carter et son équipe durent donc composer en catastrophe un scénario qui reprenne quelques éléments du projet initial, mais en y rafistolant l'ensemble. Les révisions sont arrivées assez tard dans le processus d'écriture. Au final, on a donc ce récit un peu fourre tout qui a l'air de pointer plusieurs directions. Très franchement, la première fois que je l'ai découvert, je n'ai pas tout compris. Comme à la base il s'agissait d'une première partie orpheline d'un projet de cross over, l'épisode ne se conclut pas. Tu vas me dire que ce n'est pas nouveau dans X-Files. Oui, c'est vrai. Sauf que là, Scully annonce réellement à la toute fin: "l'affaire reste ouverte et non résolue". Effectivement, une fin ouverte est une superbe accroche, mais Red Museum laisse totalement le spectateur sur sa faim. Limite, on attend une seconde partie. Cette impression est dominée par le fait que le récit tente d'aborder plusieurs sujets, mais sans vraiment les approfondir:On y parle d'adolescents qui se font enlever puis abandonner en forêt, presque nus et l'air agar. Ce pan scénaristique revient sur les expérimentations que le gouvernement a effectué sur une campagne de vaccination sur ces enfants. Un élément déjà esquissé par la bouche même de Gorge Profonde, à la fin d'Erlenmeyer Flask. Revenir dessus est intéressant, mais le reste est tellement nébuleux qu'on peine à se satisfaire de toute cette histoire. Ensuite on nous présente un type qui se cache dans une maison et qui espionne une famille. On passe ensuite au sujet de la viande bovine qu'on relie très vite au Musée Rouge, une secte pacifique de végétariens. Enfin, il y a ce docteur qui se crashe en avion avec une mallette plein de thune. Hé ! Tu pensais que c'était fini ? Non non. Pour épicer le tout, Red Musem réintroduit l'Homme au Crane Rasé, le meurtrier présumé de Gorge Profonde. Bien entendu, toutes ces sous intrigues se relient à un moment donné, mais c'est... trop. C'est vraiment trop dense de développer autant d'éléments en moins d'une heure d'émission. 

D'ailleurs parlons en des apparitions de l'Homme au Crane Rasé. Sa mort est totalement anecdotique, notamment parce qu'elle est filmée hors champs. Même si c'est voulu pour montrer que Mulder échappe à venger lui même la mort de son informateur, cela renforce l'aspect superflu de l'ensemble. Pourtant, prises indépendamment, plusieurs des différents éléments scénaristiques sont intéressants. Tout ce qui tourne autour des adolescents est intrigant, à l'instar des préoccupations des hormones qu'on injecte aux bovins. Toutes ces pistes auraient pu donner lieu à un épisode entièrement dédié à ces thématiques distinctes. C'est d'ailleurs un peu le cas pour le segment dédié aux vaches, puisque les auteurs de la série puiseront à nouveau là-dessus pour élaborer Our Town.
Malgré tous ces rendez-vous manqués, et à l'aspect un peu Frankenstein de l'épisode, Red Museum n'est pas désagréable à regarder. C'est un morceau de télévision chaotique, mais qui offre quelques moments sympathiques, comme cette mignonne scène dans laquelle Mulder essuie la bouche de Scully, quand ils dinent dans un restaurant. En définitif, on est très loin de ratés comme "3" ou Space, par exemple. Compte tenu des gros soucis de production, on peut dire que l'oeuvre livrée est une pièce intéressante, quoiqu'un peu vaine.


11. EXCELSIS DEI (Excelsis Dei)

Autant il y a pas mal de choses à sauver dans Red Museum, autant Excelsis Dei est un épisode compliqué. Il y a des éléments à sauver, comme souvent avec les segments médiocres, mais l'histoire relatée ici est un peu antipathique. Le plus frappant est le manque d'empathie de Mulder envers Michelle Charters, cette infirmière qui s'est faite violée par une entité invisible. A l'époque déjà, je trouvais ça étrange. Ordinairement, notre agent sait être à l'écoute des victimes qu'on ne croit jamais. Et d'autant plus lorsque des phénomènes paranormaux sont à l'oeuvre. Au contraire, ici, l'homme rejette les accusations de Charters en ne la croyant pas, et se montre même condescendant envers elle. Le type croit à tellement de choses, mais ici, non. C'est très étonnant et en total décalage avec ce que l'on connait du personnage. Pire ! Même si la femme n'a pas été abusé par un esprit invisible, elle n'en reste pas moins une victime d'un crime, comme l'atteste Scully qui rappelle à son collègue qu'elle porte d'innombrables blessures. Mulder se présente donc ici en parfait connard. On pourrait attribuer ces incohérences à Paul Brown qui écrit ici son second scénario, après Ascension. Mais ce n'est pas la première fois que la série convoque des auteurs qui viennent furtivement écrire un ou deux scripts. Et on sait que le noyau dur des scénaristes de l'équipe relit tous les textes. 
Le viol subit ici constitue ce qui ouvre l'histoire: Il sert le pré-générique et il est le point d'entrée dans lequel Mulder et Scully arrivent dans cette enquête. Mais il est surprenant que le drame de cette infirmière soit balayé d'un revers de main. On ne la croit pas. Très vite, elle est renvoyée à son boulot, puis sa vie est mise en danger dans le dernier acte. Personne ne compatit à sa douleur et personne ne vient s'excuser, ni même Mulder. Je dois avouer que, plus jeune, cet aspect me passait au dessus de la tête. Après avoir revu l'intégrale ces dernières années, cette partie d'Excelsis Dei me saute aux yeux. J'ai été beaucoup plus sensibilisé à tout ça.

Le cringe de l'épisode ne s'arrête pas là, car on ne peut pas occulter le racisme latent envers le personnage de Gung. Intégrer un infirmier asiatique qui donne des psychotropes à des vieillards, ok, mais il y a quelque chose de gênant de dépeindre un "étranger" en mettant en avant ses attributs exotiques: son mode de pensées et sa spiritualité. En gros, en insistant sur le fait qu'il est quand même bien différent des autres et, en outre, il ramène des pilules magiques sur notre territoire, pour les donner à des résidents d'une maison de retraite. On ne sait d'ailleurs pas d'où il vient exactement. Non, le personnage est réduit à sa simple fonction d'étranger mystique. Idem, cette partie problématique de l'intrigue me passait au dessus de la tête. Petit, Excelsis Dei était juste un épisode nul. Un des quelques ratés de la série en somme. Mais avec mon regard actuel, je le trouve assez dérangeant. J'irai même plus loin, c'est un épisode épouvantable. L'aspect le plus intéressant réside dans ces personnes âgés qui semblent être totalement abandonnées par leur famille. L'accent mis sur Alzheimer aurait pu donner lieu à de scènes plus déchirantes. Ce n'est pas tellement le cas, même si le seul moment vraiment touchant se situe à la toute fin, lorsque Leo, privé des pilules magiques, ne peut dessiner que de simples formes sur une feuille. Alors qu'avant qu'il ne replonge dans la maladie, on le voyait élaborer une impressionnante fresque sur un mur de l'hôpital. C'est le seul passage vaguement convaincant du métrage. Une maigre consolation tout de même.

Il y a d'autres moments gênants comme quand Hal retire sa serviette de bain devant nos deux agents. La scène est censée être une parenthèse comique, mais elle est plus embarrassante que rigolote.
De surcroit, l'histoire reste flou quant aux délimitations des forces à l'oeuvre ici: On ne comprend pas vraiment si c'est Hal qui viole Michelle ou si c'est un des fantômes qui squattent la maison de retraite. Pareillement, on ne comprend pas comment ces esprits puissent influencer même les gens qui n'ont pas pris de pilules. Ces dernières semblent effectivement servir à ouvrir la passerelle entre deux mondes. Mais les contours restent assez flous. On apprend qu'il y a des esprits qui hantent les lieux, mais les champignons donnés aux résidents semblent également leur conférer le pouvoir de se dédoubler.

L'épisode a été réalisé par Stephen Surjik, le réalisateur de Wayne's World 2. L'homme était fan de la série et désirait absolument travailler dessus. A ce propos, on ne peut pas dire que le métrage brille de ce côté là, mais la maison de retraite est fascinante en elle-même. Certains membres du tournage craignaient de s'aventurer très loin dans cette demeure, car ils avaient entendu des voix mystérieuses. Certains avaient peur que les lieux soient véritablement hantés. La séquence qui voit une pièce se remplir d'eau, avant de se déverser son contenu dans un long couloir, a été une véritable galère à mettre en place. L'effet a été assez onéreux à concevoir.
Par ailleurs, Excelsis Dei utilise des tropes d'horreur assez faciles. Ses aspects les plus dérangeants et ses personnages peu sympathiques confèrent à l'ensemble une drôle de sensation. C'est un mauvais épisode. De plus, passer après autant de solides oeuvres au milieu de cette saison 2 ne jouent clairement pas en sa faveur.



12. AUBREY (Aubrey)

Aubrey est un chouette épisode mêlant visions prémonitoires et meurtres en série. La séquence d'ouverture est à ce titre exemplaire: Lorsque cette inspectrice, devant un motel, est prise d'un malaise et qu'elle est victime de visions terribles, dans lesquels elle voit un meurtrier enterré sa victime dans un champ. Puis, on la voit parallèlement creuser, avant que la caméra ne recule, dévoilant le fait qu'elle se retrouve perdue dans un champ. La mise en scène de cette intro est incroyable et, globalement, tout l'épisode est de haute tenue. C'est normal, c'est à nouveau Rob Bowman au commande. Aubrey est un super thriller de tueur en série. Il est assez effrayant aussi: Le passage où BJ Morrow se réveille et voit le mot "sister" tailladé sur son torse est glaçant. Toute la séquence dans la piscine est impressionnante et infuse du macabre dans la découverte du corps.
Aubrey est un petit film d'horreur solide, avec une enquête qui s'étale sur plusieurs décennies. En mélangeant, le passé, via les flashs de BJ, et les découvertes actuelles, l'intrigue sait dérouter le spectateur. Il faut attendre que les différentes pièces du puzzle s'assemblent correctement. Mulder et Scully mettent finalement pas mal de temps avant d'avoir la bonne théorie. L'épisode traite de la mémoire génétique et sur, plus généralement, l'héritage du mal: Ici, on constate les conséquences durables que les crimes perpétués par Henry Cokely, un vieux tueur psychopathe, ont laissé derrière lui. Qu'il a véritablement détruit des vies. Pourtant, confronté à Mulder et Scully, l'homme refuse d'assumer la responsabilités de ses actes. La culpabilité revient très souvent tout le long du récit.
L'étude du personnage de BJ constitue ici le point fort de cette enquête. L'actrice Deborah Strange effectue un excellent travail. On sent vraiment la protagoniste être totalement déboussolée, et ne pas comprendre ce qu'il lui arrive. Terry O'Quinn a du mérite également, même si on ne le voit pas beaucoup. A ce propos, l'acteur reviendra camper deux autres rôles différents dans la série: Dans le film Fight The Future, puis dans Trust No 1 de la saison 9. Ce n'est pas la première fois que des acteurs reviennent jouer plusieurs rôles.

L'ironie est d'avoir placé Aubrey juste après Excelsis Dei. Autant, le viol apparaissant dans ce dernier constituait principalement une accroche pour le teaser, sans vraiment traiter le sujet ensuite, autant le premier décrit les lourdes conséquences du viol relaté hors champs de son intrigue. Toute la dernière partie sait se montrer déchirant à ce sujet. Malgré l'horreur entourant toute cette histoire, Aubrey est un épisode qui sait être sensible. Il offre le bon rôle aux femmes: que ça soit BJ, madame Thibedeaux et même Scully. Effectivement, cette dernière affiche de la compassion, lors du premier acte. Le scénario est l'oeuvre de Sara B. Charno, l'une des rares scénaristes ayant écrit pour X-Files. Par la suite, elle écrira The Calusari un peu plus tard dans la saison. En revanche, les hommes sont dépeints comme soit violents et inconséquents, soit peu sympathiques. Cokely est une ordure finie, mais Tillman est présenté comme une figure plutôt antipathique: Il trompe sa femme avec BJ. Il se montre peu agréable avec cette dernière. Lorsqu'elle lui annonce qu'elle est enceinte de lui, il la pousse à avorter. Comme on l'a déjà vu auparavant, Mulder sait être touché par les victimes incomprises. Cependant ici, c'est Scully qui se montre plus sensible. Dans l'absolu, notre héroïne a une meilleure gestion des relations sociales. Elle sait comment gérer et être avenante quand il le faut. Mulder peut l'être également, mais il demeure parfois assez instable émotionnellement. Il en fait parfois trop.
Aubrey est un épisode sinistre qui sait, paradoxalement, être touchant. La conclusion est à ce titre vraiment terrible.



13. IRRESISTIBLE (Le Fétichiste)

Irresistible est étonnant pour plusieurs raisons: Tout d'abord, il est un des très rares opus dénué de paranormal. L'horreur présentée ici est malheureusement parfaitement humaine. Mais c'est aussi un incroyable épisode centré sur Scully, qui revient enfin sur les conséquences de son enlèvement. On commençait presque à s'inquiéter que la série ne revienne pas sur les traumatismes causées par cette expérience. Et heureusement, le récit ici décrit tout cela de manière vraiment touchante.
Il est vrai qu'il était délicat pour Chris Carter d'avoir interconnecté huit épisodes en début de saison, et ainsi élaborer un arc si important sur Scully, pour ensuite revenir subitement à la structure initiée par la saison 1. Il y a du très bon depuis le retour du protagoniste, notamment Firewalker et Aubrey qui tirent leur épingle du jeu. Mais beaucoup de fans ont pu se montrer frustré de ce retour au source aussi vite. Irresistible tombe donc au bon moment pour combler quelque peu un manque.
L'intrigue nous raconte l'histoire de Donnie Pfaster, un terrible fétichiste qui a un vrai problème avec les femmes. Il prend plaisir à exhumer des cadavres afin de leur couper les cheveux, les ongles, et parfois les doigts pour les emmener avec lui. Très vite, l'enquête réveille quelque chose chez Dana: Elle a beaucoup de mal à gérer sa peur face aux profanations présentées ici. Probablement qu'en temps normal, elle aurait pu y faire face, mais on peut supposer que cette affaire là est de trop: Il est suggéré que Scully retrouve très vite le chemin du bureau après être sorti du coma. En tout cas, le dialogue entre les deux agents, au début de Firewalker, va dans ce sens. Ce qui fait que le personnage n'a même pas eu le temps de pleinement se remettre sur pied et se reposer. Irresistible révèle qu'elle consulte une thérapeute dans laquelle elle revient sur son enlèvement. La scène est évidemment poignante, mais elle met en lumière la récente fragilité de Scully. David Nutter, le réalisateur, a déclaré qu'il avait porté une attention toute particulière à ce script. Il voulait rendre honneur à l'épisode "stress post-traumatique" de l'héroïne. Et effectivement, c'est un moment d'introspection important, pour que le personnage puisse prendre du recul sur les lourds événements qu'elle a subit, il n'y a encore pas si longtemps.
Certaines voix se sont élevées pour dénoncer le fait que Scully soit séquestrée par Donnie Pfaster. Même si je peux comprendre les raisons, je trouve que ce n'est pas non plus hors de propos ici. Cela le deviendra lorsque la dame sera de nouveau malmener, au terme d'Our Town, en fin de saison. Là, ça commençait à faire beaucoup. A ce propos, la scène dans laquelle notre héroïne voit le visage de son ravisseur changer provient de réels témoignages de victimes d'enlèvements. En effet, ces dernières ont eu l'impression de voir leur kidnappeur changer de tête. A la fin, lorsque Scully s'effondre en pleurant dans les bras de Mulder reste un des moments les plus touchants de toute la série. Ce geste de tendresse, assez rare, démontre leur proximité. 

La prestation de Nick Chinlund dans le rôle du fétichiste hisse véritablement le métrage vers le haut. Sa banalité le rend terrifiant. Il est capable d'avoir l'air vraiment charmant, mais un changement dans son regard peut immédiatement engendrer le malaise. Son air totalement détaché le rend définitivement effrayant. Son obsession pour le shampoing et les cheveux propres de ses victimes dérange terriblement.
Chinlund a tellement marqué les esprits que, lors d'une interview, Chris Carter avait confié avoir revu l'acteur à Hawaï, au loin. Ce dernier ne l'avait pas vu, mais le showrunner a vu des gens pointer du doigt l'acteur, et reconnaître le fétichiste d'X-Files. Il avait trouvé ça dingue d'être spectateur de ça.
Pour l'anecdote, dans le script initial, Pfaster devait clairement être nécrophile, mais la chaîne s'opposa fermement à cette idée. C'était trop pour eux. Cependant, même si le terme n'est jamais clairement mentionné, l'épisode insinue fortement que notre psychopathe est nécrophile.
Carter signe là d'ailleurs un de ses scénarios les plus forts. Cette expérience l'a tellement plu que ça lui a inspiré la série Millenium.
Irresistible représente un des sommets de la saison 2, et est même régulièrement cité parmi les épisodes ayant le plus marqué la X-Files



14. DIE HAND DIE VERLETZ (La Main De L'Enfer)

Un épisode terrifiant ! J'ai toujours trouvé ce scénario de Glen Morgan et James Wong particulièrement glauque et effrayant. Pourtant, il subsiste quelques petites touches d'humour noir ici et là, mais je suis désolé, le coeur de cette histoire est horrible. Il suffit d'écouter le long monologue de Shannon qui relate des événements effroyables qu'elle aurait subit, petite, elle et sa soeur. Alors, oui, ces souvenirs sont partiellement vraies (j'avais mis du temps à la comprendre plus jeune), mais ça n'empêche qu'ils font froids dans le dos. En outre, plusieurs séquences me mettaient très mal à l'aise: Par exemple, celle où l'adolescente se coupe les veines ou lorsque le coeur du petit cochon se remet à battre de nouveau. Brrrr...
Mais plus généralement, c'est un brillant segment, très macabre et mis en scène avec élégance. L'atmosphère est délicieusement ténébreuse. Toute cette esthétique visuelle est l'oeuvre de feu Kim Manners qui réalise là son premier épisode de la série. L'homme deviendra, aux côté de Rob Bowman, l'un des metteurs en scène les plus prolifiques d'X Files. Et pour une première, c'est un sacré coup de maitre.
Pourtant, Die Hand Die Verletz n'est pas un métrage très fin, et c'est résolument le but recherché: Tout y est hyper exagéré. Des révélations de Shannon sur ce qu'elle a subit jusqu'à cette secte de profs adorateurs de Satan, tout est too much. Et pourtant, c'est diablement efficace. Et selon votre sensibilité, vous pouvez trouver l'épisode drôle ou juste horrible. En définitif, les deux lectures semblent valables.
Il est vrai que la scène où Mme Paddock révèle sa vraie nature, en déposant les copies d'élèves dans un tiroir, au-dessus d'un coeur et de yeux d'une victime, tend davantage vers l'humour noir. La satire est clairement de mise ici.
Un des passages les plus emblématiques reste ce moment où un des profs sataniques se fait dévorer tout cru par un python géant. A ce sujet, l'épisode tout entier a été construit autour de cette idée: le duo Morgan/Wong avait esquissé cette ébauche d'un serpent qui mange quelqu'un pour un scénario. Dan Butler, l'acteur qui jouait Jim Ausbury, la malheureuse victime, avait la phobie des serpents. Il appréhendait tellement le tournage de cette scène, car, oui, l'équipe a utilisé un véritable python pour jouer la bête. L'homme était incapable de prononcer un seul mot. La sueur qui coule sur le visage de Butler, pendant la séquence, est tout à fait authentique. Un tournage décidemment sous le signe des animaux, puisque la production a utilisé de véritables grenouilles, qu'elle a fait tomber sur la tête de Duchovny et Anderson, afin de créer la pluie.
Le pré-générique est aussi étonnant car il est un des rares qui ne se conclut pas la mort de quelqu'un, même si le reste du récit se rattrapera ensuite en empilant les cadavres.

Die Hand Die Verletz détourne les clichés en démontrant que les adorateurs de satan dans cette histoire sont des profs de la classe moyennes, pendant que les autres adultes accusent facilement les jeunes d'être constamment tentés par le diable. Ecoutez du heavy metal suffit pour faire d'eux des coupables idéaux. L'épisode déjoue donc les paniques morales que l'on retrouvait déjà dans les années 90.
Mulder et Scully semblent dépasser par les événements, à tel point qu'ils comprennent bien trop tard qui est le véritable coupable dans cette enquête. A la fin, lorsqu'ils veulent aller revoir Mme Paddock, elle a déjà disparu. A ce sujet, le texte qu'elle laisse aux deux enquêteurs sur son tableau,  "Au revoir. Ce fut agréable de travailler avec vous", est également un message du duo Morgan et Wong au reste du staff. En effet, ils ont quitté l'équipe au terme de l'épisode. Mais ils sont revenus réécrire quatre scénarios pour la saison 4. Ils sont partis créer leur propre série par la suite: Space; Above and Beyond qui ne rencontra pas le succès escompté d'ailleurs. Par la suite, Carter leur confiera une place centrale sur sa nouvelle création: Millenium. Leur départ sur X-Files a été considéré comme une vraie perte, et il est presque ironique que Kim Manners ait été recruté par les deux hommes pour ce métrage. En effet, à partir d'ici, la série consolidera quasiment la majeure partie du noyau dur qu'il l'accompagnera tout du long. Il manque juste Vince Gilligan qui arrivera dans quelques épisodes. Je rajouterai qu'on n'a pas de réelle conclusion ici. Sauf qu'elle est nettement bien moins frustrante que dans le décevant Red Museum. Il y a même quelque chose de logique ici: On ne peut pas mettre la main sur le diable. Ou... on ne peut pas le foutre derrière les barreaux. Oui, tu te souviens lorsque la Fox voulait que Mulder et Scully arrêtent le méchant à la fin des enquêtes...
Die Hand Die Verletz est un solide segment qui démontre que X-Files peut tout doucement commencer à jongler entre plusieurs tons.


15. FRESH BONES (Mystères Vaudou)

Howard Gordon à l'écriture et Rob Bowman à la réalisation. Un parfait combo pour un épisode impressionnant. Oui parce que Fresh Bones est un petit film impressionnant. En effet, comme à son habitude déjà, Bowman concocte de nombreux moments assez virtuoses visuellement. La course poursuite entre Mulder et Chester est filmé de manière assez incroyable.  Le passage nocturne dans la voiture de Scully, lorsqu'elle a une vision d'un mec qui sort de sa main est assez terrifiant. Pareillement, tout le teaser sait se montrer mystérieux et tendu, lorsque ce militaire commence sa journée en gueulant sur sa famille, puis en finissant mort dans un accident de voiture. Les tragédies relatées ici sont vraiment (et malheureusement) excellemment mis en valeur. Dans le même ordre d'idées, le drame personnelle que raconte Dunham à notre duo est terriblement glaçant, alors qu'on ne voit que le personnage parler, pendant toute la scène. Fresh Bones regorge d'images saisissantes, mais l'intrigue n'est pas en reste. Au départ, nous avons du mal à relier les différents points. On a du mal à savoir qui joue quel rôle dans toute cette affaire. Déceler qui est antagoniste n'est pas non plus une chose évidente. Mais l'histoire se montre de plus en plus limpide, au fur et à mesure. A ce titre, le titre français est plutôt bien choisi car le mystère est vraiment un élément primordial ici. On ne devine pas tous les tenants et aboutissants de toute l'enquête à mi parcours. D'ailleurs, même si on met doucement les pièces du puzzle à leur place, le scénario laisse volontairement quelques zones d'ombre.
Fresh Bones est une oeuvre tellement confiante à ce niveau là de la série. Il serait amusant d'imaginer à quoi aurait pu ressembler une histoire pareille, au cours de la saison 1, lorsque l'équipe créatrice n'était pas encore très à l'aise.

Howard Gordon a eu l'idée du sujet lorsqu'il tomba sur des articles qui détaillaient le suicide de plusieurs soldats américains en poste à Haïti. Le camp rempli de réfugiés haïtiens maltraités par des soldats étasuniens contribue à apporter un cadre oppressant à l'ensemble. Mais l'intrigue ne prend pas parti pour un ou l'autre parti, puisqu'on se prend de compassion, à la fois des conditions inhumaines des haïtiens enfermés, mais tend à mettre en lumière la dure vie des militaires. Cependant, le dernier acte démontre avec clarté qui est le salopard dans toute cette affaire, mais il était intéressant de brouiller les pistes, et ne pas avoir de "gentils" et de "méchants" clairement définis. L'épisode dépeint un tableau peu reluisant de ce que la première puissance mondiale peut faire subir à certains réfugiés. A ce titre, la scène où Mulder et Scully marchent à travers le camps, au milieu des haïtiens, laissent le spectateur s'interroger sur la façon dont le pays traite ces gens. Fresh Bones sait donc créer le malaise.
Paul A. Cantor, un critique littéraire américain avait souligné que le scénario ici évitait le syndrome du sauveur blanc qui libérait les noirs de la tyrannie des autres noirs. Il explique que Mulder et Scully ici constatent les injustices, mais qu'ils ne pourront rien changer. Et c'est vrai que l'intrigue aurait carrément pu se montrer problématique si elle avait été écrite autrement. Cela fait plusieurs fois dans cette saison que nos deux héros sont plus observateurs qu'acteurs. Et ce n'est clairement pas un mal dans les différentes histoires relatées jusqu'ici. Dans Red Museum, même si l'épisode est bancal et frustrant, on peut légitimement comprendre la fin. Dans Die Hand Die Verletz, les deux agents ne peuvent pas attraper le démon, comme je l'ai déjà mentionné. Puis dans Fresh Bones, ils ont les mains liés et ne peuvent pas résoudre le conflit qui se présente à eux.
Le récit révèle que ce n'est pas le vaudou haïtien l'ennemi. Non, il démontre que c'est Wharton, le général du camp qui commet des actes horribles: Un type blanc qui s'approprie les croyances et coutumes étrangères pour arriver à ses fins. A contrario, toutes les manifestations magiques provenant des réfugiés sont inoffensives, et se montrent même bienveillantes envers nos deux héros. Bien sûr, le métrage subvertit totalement nos attentes, et c'est plutôt bien vu.

Fresh Bones est un excellent segment d'X-Files. Il sait manier le mystère et la terreur. Son propos épineux aurait pu lui sauter à la tronche, mais il s'avère qu'il est finalement pertinent. Et puis, il y a Chester qui était quand même trop chou, surtout transformé en chat noir.



16. COLONY (La Colonie Partie 1)

Ok. Les extraterrestres existent donc bel et bien. Ce nouvel double épisodes vient donc corroborer cette réalité. Bien entendu, nous n'étions pas dupe, puisqu'on est dans X-Files, et que nous avons déjà vu trop de phénomènes extraordinaires pour douter de l'existence des aliens. Pourtant, du Pilot jusqu'à Duane Barry, la série laissait malgré tout planer le doute. On y voyait des événements très étranges, mais difficile d'établir un lien vraiment tangible avec les petits hommes gris. On s'en doutait, oui, mais nous voulions que Mulder en soit totalement convaincu. Colony et End Game nous montre clairement des extraterrestres. Pire ! Ils vivent même parmi nous (comme le suggérait Gorge Profonde à la toute fin de Deep Throat) ! On a même la première apparition du chasseur de prime extraterrestre. Une idée toute droite sortie de la tête de David Duchovny. L'homme est même crédité dans le scénario ici, aux côtés de Chris Carter. L'acteur s'investira de plus en plus dans l'écriture de la série. Ses contributions se révéleront cruciales dans le développement de la mythologie. 
En outre, Colony et End Game cassent toute l'imagerie aliens qu'on a eu jusqu'ici: Il n'y a pas de soucoupes volantes, d'enlèvements ou de petits hommes gris. On a quelque chose de plus pulp, de plus "science fiction", si je puis dire. En effet, le tueur est un être polymorphe, et il doit abattre d'autres de ses congénères qui ressemblent tous à des clones à l'apparence humaine. Lorsqu'ils se font tuer, ils perdent du sang vert et disparaissent dans une grosse flaque verdâtres et toxiques. The Erlenmeyer Flask nous montrait déjà des hybrides aux sang vert et toxiques. C'est donc une suite logique. Finalement, ce final de la saison 1 proposait déjà toute cette imagerie, loin de la culture des OVNIs auquel le show nous a habitué. Le diptyque ici nous révèle que les aliens qui squattent notre planète ont un plan. Ce n'est plus juste des vaisseaux spatiaux qui enlèvent des gens au hasard. Non, l'épisode nous prévient qu'il y a bien plus que cela. Quelque chose de bien plus grand est à l'oeuvre en coulisse.

Avec Colony, l'intrigue mythologique évolue. Après avoir été timide lors de la première année, ici le fil rouge progresse en flèche. Les saisons 2 et 3 ont tendance à énormément fait avancer cette grande histoire principale. Ce ne sera pas toujours le cas des saisons 4 et 5 qui, malgré d'indéniables qualités, ont plutôt eu tendance à ralentir la cadence, notamment pour éviter d'emboiter trop le pas du futur film Fight The Future. Seul l'étonnant diptyque Patient X et The Red And The Black a apporté beaucoup de nouveaux éléments concrets, à tel point que le dit film semblait effectuer un pas en arrière, après avoir été diffusé après ce double épisode suscité. Une étrange erreur de calcul de Chris Carter.
Mettre en plein jour les extraterrestres dans Colony et End Game est salutaire, car cela permet d'éviter une certaine frustration chez le spectateur. Si les scénaristes avaient continué cette rétention d'informations, le public aurait pu commencer à se lasser. Avoir proposé cette longue histoire, au milieu de la saison 2, a été plutôt judicieux. Un bon timing !

Comme précité, Colony nous présente le chasseur de prime extraterrestre, qui allait être un rôle récurrent. Brian Thompson, son interprète est impeccable et, bien évidemment, son personnage évoque immanquablement le Terminator et le T-1000. Histoire de renforcer cette proximité, Thompson a été justement la première victime du Terminator, et il lui a même fourni sa garde robe, par la suite. J'adorais ce tueur polymorphe. Il ajoutait une surcouche très "comics de science fiction". Et j'aimais que la mythologie épouse totalement le genre sans le renier. J'aimais bien la mythologie plus conspirationniste et "sérieuse" jusqu'ici, mais Colony fait entrer le mytharc de plein fouet dans une dimension.
Mat Beck, le technicien des effets spéciaux, était ravi d'avoir Brian Thompson, car son visage carré et très marqué fut un bonheur à utiliser pour le morphing.
Colony nous permet même de nous présenter la famille de Mulder: On y découvre Bill Mulder mais aussi Teena Mulder. Oh ! J'allais oublier ! On nous présente même... Samantha Mulder ! Mais est-ce vraiment elle ? Toutes ces retrouvailles sont bouleversantes, mais ces scènes distillent également un étrange sentiment de malaise. On sent que cette famille a été totalement brisé par l'enlèvement de la soeur de Fox.
Colony est une nouvelle preuve de l'intelligence des scénaristes qui arrivent à enrichir le personnage de Scully, notamment en lui donnant du poids, dans un monde qui lui donne tort à chaque enquêtes. Ici, c'est elle qui se montre raisonnablement méfiante envers l'inspecteur Chapell, alors que Mulder gobe tout ce que lui raconte ce type. Lorsque cette dernière reproche à son partenaire sa crédulité et son absence de méfiance, Mulder lui rétorque juste "Maintenant, je fais confiance à tout le monde" de manière sarcastique. Son cynisme ne peut camoufler le fait qu'elle est indispensable pour le "rappeler à l'ordre". Scully a beau se tromper dans de nombreuses affaires, car son scepticisme n'a malheureusement pas toujours sa place dans l'univers d'X-Files, elle n'en reste pas moins importante, car le comportement de Mulder n'est pas toujours adapter à toutes situations.

Colony est une belle avancée pour la mythologie de la série. On apprend tellement de choses. Tout va si vite et les révélations pleuvent plus que ce qu'on ne les croit. On y parle même d'une colonisation extraterrestre. Ce segment nous dévoile donc une grosse partie de ce que le syndicat appellera à de nombreuses reprises "le projet".



17. END GAME (La Colonie Partie 2)

Un blockbuster ! Le double épisode Colony et End Game a été conçu comme un vrai petit blockbuster. L'idée d'intégrer une impressionnante séquence de sous marins, coincée dans la glace, au point culminant de la seconde partie, rejoint le désir de Chris Carter de vouloir en mettre plein les yeux. Cette façon de procédé codifiera les principaux axes des grands arc mythologiques, scindés en plusieurs segments. On y retrouve également un souffle nettement plus épique, en plus de privilégier les moments d'action, à l'instar d'Ascension.
Il est vrai qu'End Game multiplie les actes de bravoure. Il y a beaucoup à apprécier ici, comme, évidemment, Mulder qui se perd dans l'Alaska, mais également la scène de prise d'otage, lorsque Scully est enlevée (encore ??) par le chasseur de prime polymorphe, afin de procédé à un échange avec Samantha. Ce passage est d'ailleurs terriblement tendu et efficace. A ce propos, le passage où le tueur alien s'en prend à Scully, en se faisant passer pour Mulder, est très troublant: Voir le visage fermé de Duchovny qui maltraite sa coéquipière est un moment de pur malaise. Et puis, il y a cette confrontation très musclée entre Skinner et Mr X, lorsque le premier exige des réponses au deuxième, dans l'ascenseur de Mulder. Les échanges de coups paraissent vraiment impactant et violents. Mitch Pileggi, l'acteur qui joue Skinner, a tellement mis d'enthousiasme qu'il a pété le décor de l'ascenseur, lorsqu'il projeta Steven Williams contre le mur. La séquence élève de nouveau le directeur adjoints au rang d'allié fidèle de nos deux agents, en plus de donner un aperçu du côté badass du protagoniste. Cette scène a été énormément apprécié par les fans, à l'époque. Elle a été régulièrement cité comme un instant très mémorable de la série.
End Game est le premier scénario écrit par Frank Spotnitz, même si il avait soufflé l'idée du retour de Samantha pour Colony. L'auteur deviendra très vite le bras droit de Chris Carter, lors de la conception des arcs mythologiques. L'homme sera même crédité sur les deux films de la franchise. A ce propos, c'est son inexpérience qui lui fera écrire une section avec un sous marin. Spotnitz ignorait qu'inclure une telle scène poserait un problème d'un point de vue budgétaire. L'artiste en remettra une couche avec un Mulder sautant sur un train en marche, à la fin de Niseï, dans la saison 3. 
A la réalisation, c'est encore monsieur Rob Bowman qui explose tous les potards afin d'offrir un spectacle assez impressionnant. Bien entendu, cette conclusion à Colony évite de répondre distinctement aux questions soulevées par le diptyque. Ce sera la fameuse devise de Chris Carter qui souhaitait que chaque réponse apporte son lot de nouvelles questions. Une constante dans le mytharc, pour le meilleur et pour le pire: En effet, cette manière de procédé maintiendra le mystère lié au fil rouge, en plus d'exciter les plus fervents fans, mais aura la fâcheuse tendance à démultiplier l'immense toile scénaristique de toute cette grande intrigue. En résulte des saison 4 et 5 qui vont venir rajouter plusieurs éléments, jusqu'au point de perdre une partie du public, intimidé par la densité de la conspiration. Heureusement, la saison 6 va venir faire le ménage dans tout ça...

Difficile de juger à quel point Chris Carter avait anticiper différents éléments importants de la mythologie. Colony et End Game préfigurent beaucoup d'éléments essentiels. Les scènes très gênantes entre Mulder et son père ont l'air d'en révéler beaucoup plus, lorsqu'on connait certaines réponses des saisons suivantes: Si tu découvres la série, je vais donc placer un petit avertissement "spoiler". 
ATTENTION SPOILERS !!!!

Lorsque Bill Mulder nous est présenté, dans la pénombre, fumant une cigarette, l'image semble étrangement évocatrice pour qu'on ne pense pas à l'Homme à La Cigarette.
Idem, le fait que Mulder fasse un choix déchirant en échangeant sa soeur contre Scully dresse un parallèle glaçant avec le propre choix cornélien de son propre père; lui qui a échangé la vie de son fils contre sa soeur. Les dialogues ambigus du paternel, lors de Colony, provoquent le trouble, lorsqu'on sait ce qu'il va advenir.

FIN SPOILERS !!

Chris Carter a déclaré de nombreuses fois qu'il avait en tête les grandes lignes du mytharc. On peut vraisemblablement supposer qu'il n'avait pas tout anticipé et que pas mal d'intrigues ont été élaboré au fur et à mesure. Cette manière de procédé n'est absolument pas honteuse, contrairement à ce que les détracteurs de ce genre de séries feuilletonnantes ont l'air de penser. Cette façon d'écrire au long cours accorde une grande place à la spontanéité, et permet tout de même d'avoir moult atouts.
Mais à ce stade, difficile de savoir si Carter avait à l'esprit les grandes lignes du drame familiale de la famille Mulder, qui vont se dévoiler au fil des saisons.
Quoiqu'il en soit, Colony et End Game, à l'instar finalement du duo Duane Barry/Ascension, vont codifier l'art de balancer une intrigue riche en questions, mais en ne révélant qu'une portion des éléments du récit, laissant le reste pour plus tard. Ce n'est pas un problème: les questions sont alléchantes et le peu de réponses suffisamment satisfaisantes pour qu'on accepte de patienter au prochaines montagnes russes du mytharc. Les diptyques et triptyques mythologiques allouent une telle place aux rebondissements qu'on acceptera de patienter à chaque fois... jusqu'à un certain point de rupture. Encore une fois, heureusement que la saison 6 se décidera de lâcher les valves, et de remettre les pendules à l'heure. Malheureusement, la saison 7 s'efforcera de réanimer cette conspiration devenue zombie, et ne parlons même pas des saisons 8 et 9 (malgré toute mon affection envers la saison 8).



18. FEARFUL SYMMETRY (Parole De Singe)

Difficile encore une fois de passer après un double segments mythologiques. Sauf que, contrairement à Firewalker, Fearful Symmetry n'est pas positionné de manière très appropriée. Le problème est qu'il traite d'enlèvements extraterrestres, juste après un massif diptyque qui a énormément fait progresser tous les grands arcs liés aux "petits hommes verts". Se retrouver donc avec un banal loner qui semble effectuer deux pas en arrière est dur à encaisser. L'intrigue ici aurait été plus judicieusement située en saison 1, lorsque ce genre d'histoires étaient encore pertinentes. Ce choix est donc très curieux. Au final, Fearful Symmetry ressemble un épisode plutôt fade, surtout au beau milieu de la saison 2. Cependant, il est très loin de faire honte à la série. Il comporte même quelques séquences mémorables comme, bien sûr, la fuite de l'éléphant invisible du teaser. Pour l'anecdote, l'équipe avait peur que la bête ait peur de se retrouver nez à nez devant un camion. Finalement, le pachyderme tomba éperdument amoureux du véhicule, car il s'amusait ensuite à lui courir après.
Ce sera le seul opus réalisé par Steve De Jarnatt, qui avait notamment pondu Miracle Mile, un incroyable thriller post apocalyptique avec Anthony Edwards. Et il fait du plutôt bon boulot sur ce métrage, mais, malheureusement, au service d'une intrigue assez pauvre. Pourtant, effectivement, le pré-générique est prometteur, mais le métrage souffre d'un gros ventre mou dans sa seconde partie. Aborder la maltraitance animal est intéressant, et l'idée des aliens qui enlèvent nos animaux pour la préservation n'est pas totalement saugrenue, mais peine à captiver. En réalité, on a l'impression que c'est un épisode sacrifié, après l'énorme Colony/End Game. Comme si la production de ces deux oeuvres a été éreintante. Jusqu'à la fin de la série, certains opus beaucoup plus faibles semblent presque inévitables. Comme si Carter et son équipe étaient moins reposé et qu'ils avaient moins de clairvoyance pour voir pourquoi un script tel que Fearful Symmetry pose problème.
Mais encore une fois, j'ai tout de même de la sympathie pour ce récit d'animaux invisibles. L'histoire du singe Sophie arrive à se montrer touchante. Cette partie est clairement un renvoi à Gorille Dans La Brume, film autobiographique sur Dian Fossey, avec Sigourney Weaver. De même, Scully effectue une de ses autopsies les plus atypiques de tout le show: celle qu'elle réalise sur l'éléphant. 

Plus généralement, les personnages ici ne sont guère très convaincants. Ils ont tendance à être purement fonctionnel: Meecham, le gardien du zoo est dépeint comme un pur méchant qui maltraite les animaux. Mais les autres protagonistes semblent eux aussi assez grotesques. On peine à suivre ce qui se trame dans ce zoo. Les thèmes abordés sont intéressants mais vite expédiés, et ne sont jamais vraiment totalement creusés. Parler de la maltraitance est pertinent, mais on reste malheureusement sur notre faim. Puis le rythme patine tellement qu'on peine à trouve l'ensemble captivant. C'est horrible car on en arrive à se dire, en cours de route: "Ah mince ! C'est une mauvaise semaine pour X-Files, cette fois". Le long monologue de Mulder à la fin est incroyablement lourdingue: L'homme se permet de nous faire la leçon au terme de ce long tunnel d'une heure. C'est terriblement embarrassant.
Pourtant, tous ces problèmes n'ont pas empêché à Fearful Symmetry de remporté un prix EMA pour son message environnemental. C'est toujours ça de pris. 
En définitif, il ne s'agit pas d'un épisode épouvantable, mais un morceau de la série un peu mouif à se coltiner, avant de passer à la suite. Pourtant, je le répète, je ne peux m'empêcher d'avoir une certaine sympathie à l'égard de cet opus, malgré toutes les critiques émises.



19. DOD KALM (Le Vaisseau Fantôme)

A défaut d'avoir pondu un scénario consistant, Howard Gordon livre avec Dod Kalm un huis clos assez convaincant. A la base, c'est Chris Carter qui suggéra au scénariste d'écrire une histoire autour d'un bateau. En effet, l'équipe avait encore le temps d'utiliser le destroyer que les forces armées canadiennes leurs avaient gentiment prêter, pour les besoins de Colony et End Game. Elle profita donc de l'occasion pour élaborer un concept autour de nos deux agents coincé à bord d'un vaisseau, se trouvant au milieu d'une faille temporelle provoquant un vieillissement accéléré. La production pensait que l'épisode leur octroierait un peu de répit. En sus, la réutilisation du navire devait leur permettre d'économiser un peu de budget. Finalement, il n'en fut rien: l'équipe ne put se reposer et le métrage a été onéreux. Tourner à travers les couloirs exigus du bateau a été un enfer sans nom. Rob Bowman décrivit l'expérience comme étant un "épisode de l'enfer". Le chef décorateur Graeme Murray, le producer designer, dût rafistoler le navire pour artificiellement le faire vieillir. Et pour couronner le tout, David Duchovny et Gillian Anderson ont passé un temps considérable à se maquiller pour paraître plus vieux. L'éprouvant tournage trouve une anecdote rigolote lorsque l'actrice dût réciter un de ses dialogues vers la fin de l'histoire: En effet, son texte était: "Mais il y a une chose dont je suis sûr. Aussi certain que je sois de cette vie, nous n’avons rien à craindre quand elle sera terminée." Mais lors des répétitions, elle conclut son texte en "... il y a une chose dont je suis sûre, c'est que Howard Gordon est un homme mort !". :D
J'insiste beaucoup sur le tournage de Dod Kalm, car il représente un instant important dans la vie d'X-Files. Une de ces aventures éprouvantes auxquelles les téléspectateurs n'ont pas nécessairement connaissance, lorsqu'ils regardent un épisode, chaque semaine. Il y a bien entendu des opus qui sont tournés sans trop d'encombres, mais, à un moment donné, la production peut se confronter à un mur.

Au final, Dod Kalm se rapproche plus d'un exercice de style purement atmosphérique plutôt que de s'appuyer sur scénario vraiment dense. Il est vrai qu'il ne se passe finalement pas grand chose dedans. Evidemment, si Rob Bowman n'était pas aux commandes de l'épisode, le résultat aurait pu être nettement moins satisfaisant. Toute cette lente agonie, au sein d'un bateau qui pourrit à vue d'oeil, nous délivre de jolies dialogues entre Mulder et Scully. Cette dernière revient même sur l'expérience qu'elle a eu, lorsqu'elle était dans le coma. J'ai toujours bien aimé lorsque Trondheim, le capitaine qui  les accompagne, en a marre de les entendre balancer toutes sortes de théories sur ce qu'il leur arrive. Il est important de noter que c'est Scully qui a raison ici. Pareillement, comme elle est la scientifique du duo, c'est elle qui prépare un cocktail pour tenter de sauver son partenaire plus mal en point. D'ailleurs, le maquillage du vieillissement a régulièrement été critiqué. Mais je n'ai jamais trop compris ce reproche, car le phénomène paranormal auquel sont confrontés nos deux héros ne donne pas un aperçu de ce que serait réellement Mulder et Scully dans 40 ans. Non, c'est plutôt comme si leur corps s'oxydait anormalement vite. Grosso modo, on pourrait le résumer comme cela.
Dod Kalm propose donc une pause, certes mortelle, à nos deux agents. Il y a du désespoir qui se lit sur leur visage lorsqu'ils se savent condamnés. Voir Mulder dans un tel état ne peut laisser indifférent. Malheureusement, le récit intègre un deux ex machina, à la toute fin, lorsqu'ils se font accoster par un bateau venu les sauver. Il y avait un peu de ça dans Darkness Falls, sauf que l'armée qui sauve les deux héros avait été prévenu de leur emplacement, quelques temps auparavant. Dans Dod Kalm, la fin parait un poil plus invraisemblable. Mulder et Scully peuvent vraiment remercier leur belle étoile. Cependant, malgré cette conclusion tirée par les cheveux, l'expérience relatée ici est saisissante. Le fait qu'ils se soient vus dépérir, et qu'ils aient subit une sorte de mort très lente, reste un moment intéressant.
J'aime beaucoup cet épisode. Son tempo très lent, son caractère introspectif, ainsi que son cadre résolument atmosphérique le tirent assurément vers le haut. Sans tous ces éléments, il ne resterait bien sûr qu'un scénario assez léger. 


20. HUMBUG (Faux Frère Siamois)

On tient là un grand chef d'oeuvre. Humbug appose une trace indélébile dans la vie d'X-Files. Il s'agit du tout premier épisode clairement humoristique de toute la série. A partir d'ici, la noirceur habituelle de l'émission cédera ponctuellement sa place à des moments nettement plus légers. Il s'agit du premier véritable scénario de Darin Morgan. Comme vu plus haut, il avait déjà joué Flukeman, en plus de pitcher quelques idées pour Blood. Le départ de son frère Glen Morgan et James Wong laissa un grand vide dans l'équipe principale. Il fallait apporte un peu de sang neuf. On l'a vu: Chris Carter venait d'embaucher Frank Spotnitz, mais aussi Vince Gilligan, comme on le verra très bientôt.
Darin est quelqu'un de nature très anxieuse, et il était tétanisé à l'idée d'écrire un scénario sous la contrainte. L'homme confia qu'il a tendance à travailler lentement. De plus, il était surtout spécialisé dans la comédie. Carter approuva l'idée: il estima qu'à ce niveau là, la série pouvait souffler un peu et mettre de côté la paranoïa et l'horreur. Bon, même si Humbug contient pas mal de scènes effrayantes, malgré tout. C'est la chaîne qui craignait avoir un épisode comique. Pire que ça même: Elle s'opposa ! Carter voulut tout de même le tourner. Kim Manners avait la trouille de mettre en scène le premier volet humoristique de tout X-Files. Après le tournage, tout le monde dans l'équipe pensait que ça allait être un désastre, selon les dires de Morgan. Au final, Humbug aura été considéré comme un monument par la plupart des critiques. Pourtant, une petite minorité de fans ne l'ont pas apprécié, car trop décontenancés par le ton. Ces quelques voix dissidents ont suffit pour mettre Darin Morgan dans tous ses états. L'auteur sombra dans une dépression peu après l'épisode. Malgré tout, il reviendra signer trois scénarios pour la troisième saison. Trois oeuvres décalées qui porteront fermement la marque et la sensibilité de cet écrivain si particulier.

En attendant, Humbug est un joli conte qui parle de la différence, et sur les préjugés qui découlent lorsqu'on se retrouve devant quelqu'un de différent. Mulder et Scully doivent enquêter dans une communauté d'anciens artistes de cirque. Nos deux agents vont croiser la route de personnages haut en couleurs, qui mettront notre duo à s'interroger sur leurs préjugés face à des freaks aux attributs physiques parfois étonnants. En guise d'exemple, nos héros vont systématiquement soupçonner quasiment tout le monde, pour des motifs assez triviaux. Mais l'intrigue aime également déjouer de nos attentes: spécifiquement à travers ce pré-générique qui nous montre quelqu'un épier deux enfants dans une piscine. Finalement, l'homme se révélera être leur père. Evidemment, ce dernier a un problème de peau qui se voit sur tout le corps. On peut aisément imaginer que s'il avait été intégrer à un épisode traditionnel, ce père aurait été le "monstre de la semaine". De ce fait, le scénario de Darin Morgan met à mal la logique entière d'une série qui a tendance à considérer la différence comme potentiellement dangereuse. Au lieu de ça, les freaks de cette intrigue ne sont pas mis en scène de manière "étrange" ou terrifiante. Au contraire, Humbug célèbre l'altérité, notamment en ayant une réelle tendresse envers ses protagonistes. L'épisode ne se moque pas d'eux. Je dirais même qu'il se moque surtout de Mulder à de nombreuses reprises: Par exemple lorsque Mr Nutt, sans le connaitre, le décrit comme quelqu'un qui a l'air d'être du FBI, juste en observant ses manières et son style vestimentaire. Malgré l'humour et l'horreur qui parsèment le récit, Humbug traite la peur de la solitude, notamment lorsque Lenny confesse qu'il se sent rejeter par son frère. Cette thématique deviendra une constante dans le travail de Morgan, comme dans son fabuleux Clyde Bruckman's Final Repose (s3) qui parle d'un vieil homme seul, ou bien de Jose Chung's From Outer Space (s3) qui se conclut par cette triste citation de l'écrivain éponyme: "Car, même si nous ne sommes pas seuls dans l'univers, chacun à sa manière, sur cette planète, nous sommes tous ... seuls."
On ne peut s'empêcher de penser à Twin Peaks dans ce Humbug, avec cette communauté de personnages qui semblent excentriques, mais qui questionne également le sens de la "normalité". Et puis, ce sentiment est renforcé par la présence de Michael Anderson dans le rôle de Mr Nutt, un acteur incontournable de la série de David Lynch et Mark Frost.
Humbug intègre de véritables artistes de cirque dans son casting. Blockhead est joué par Jim Rose, un organisateur de cirque, mais aussi Conundrum interprété par The Enigma, qui a donc un véritable tatouage de puzzle sur tout le corps. 
Le premier véritable script de Darin Morgan est déjà un coup de maître. Et ce ne sera même pas le dernier...




21. THE CALUSARI (Les Calusari)

Le deuxième scénario de Sara B. Charno est clairement inspiré du cinéma d'horreur, avec son enfant démoniaque, sa grand-mère mystérieuse et sa séquence finale qui évoque immanquablement L'Exorciste. The Calusari est un épisode qui fonctionne bien. Il rend plutôt un bel hommage a tout un pan de l'horreur. Cependant, le comité de censure de la Fox trouvait le récit particulièrement violent. En outre, c'est quand même l'histoire d'une pauvre mère de famille qui perd tour à tour un de ses enfants, son mari, puis sa mère. Et chacun dans des morts atroces. C'est terrible ! Il ne serait pas exagéré de considérer l'épisode comme étant l'un des plus noirs que la série ait produite.
L'intrigue n'est pas forcément un des plus fins, mais elle a un principal but: faire peur le spectateur. En effet, The Calusari se considère comme une petite heure destinée à foutre les jetons. Et de ce côté, c'est plutôt réussi, très franchement. De surcroit, il y a de la cruauté dans The Calusari: Le pré-générique annonce la couleur en créant un suspense insoutenable, lorsque les parents courent impuissants, pour éviter que leur petit Teddy ne se fasse écraser par la petit train du parc d'attraction. Ils voient littéralement leur enfant se faire tuer devant leurs yeux. Plus tard, l'un des moments clefs réside lorsque la maman comprend que Charlie n'est peut être pas tout à fait lui même, et qu'il commence à se montrer cruel en demandant si il pourra monter dans le petit train bientôt. Le même qui a écrasé son frère. Il est intéressant de se dire qu'un tel épisode n'aurait pas pu être produit, lors de la première saison. Pourtant, il y a quelques histoires effrayantes, mais aucune n'a atteint un tel degré de malaise et de cruauté. 

A côté de ça, le reste n'est pas super bien développé: La grand mère, Golda, est intéressante, mais elle verse un peu trop dans le cliché de la "vieille sorcière" mystérieuse venue d'un autre pays. C'est un peu grossier, mais ça fonctionne malgré tout. A ce titre, Lilyan Chauvin, l'actrice qui joue la grand mère, apparait dans le jeu vidéo Phantasmagoria, et sa brève apparition évoque diablement le personnage de Golda. La production de ces deux oeuvres étant assez proche, je me suis toujours demandé si les créateur du jeu avait vu The Calusari, avant de proposer un rôle à Chauvin.
Du coup, tout ce qui est lié aux croyances roumaines a été quelques peu survolé. C'est dommage. De même Les Calusari qui tentent de sauver Charlie sont à peine esquissés. Leur utilité fonctionnelle est surtout d'être présent lors du grand final.
Pareillement, malgré l'aspect dur du métrage, la mort de Teddy n'est pas assez mis en avant. Il se fait tuer dans le teaser. Mulder et Scully en reparlent après, mais cet élément de l'intrigue est vite bazardé, avant d'être vaguement sous entendu par Charlie/Michael, vers la fin. Comme si la mort du gamin servait surtout d'accroche pour le spectateur. Cela ne m'avait pas sauté aux yeux, lorsque j'étais petit, mais adulte, cette mort est trop lourde pour qu'on y accorde pas quelques minutes de plus.
Cependant, le climax marche vraiment bien: La scène de l'exorcisme est un passage intense et dérangeant. Et très franchement, il n'y aurait pas fallu grand chose pour que la séquence tourne vite au grotesque et au ridicule. Le parallèle avec Scully se faisant balader dans tous les sens par Michael contribue beaucoup à parfaire ce moment choc. 
Les compositions de Mark Snow accompagnent merveilleusement bien le récit. Le musicien délivre de chouettes passages inquiétants et majestueux pour soutenir cette histoire d'horreur classique.
The Calusari introduit pour la première fois le personnage Chuck Burks qui viendra épauler les enquêtes (très sporadiquement) de nos deux héros.
Sincèrement, j'ai énormément de sympathie pour ce segment, malgré ses atours parfois superficiels. Il est toujours aussi agréable à regarder, puis démontre que Chris Carter et son équipe sont capables de proposer une histoire horrifique dérangeantes et cruelle, à ce stade de vie de la série.



22. F.EMASCULATA (Contamination)

Hey ! Le voilà le tout premier épisode que j'ai vu de ma vie ! Je te renvoie à ma longue introduction de l'article de la saison 1 où j'en parle brièvement. F. Emasculata est un morceau très chouette de télévision. L'histoire parle de l'émergence d'une nouvelle maladie qui débute au sein d'une prison. Sauf que des prisonniers s'échappent et risquent de contaminer la population. L'intrigue est construit comme une course contre la montre, afin d'empêcher la propagation d'une maladie mortelle: Mulder tentant de retrouver la trace des évadés, pendant que Scully enquête dans la prison. Il y a un sentiment d'urgence rudement bien retranscrit. Rob Bowman était donc le réalisateur idéal pour ce métrage, lui qui a un certain sens du rythme et du mouvement. Décidemment, Howard Gordon, qui coécrit le scénario avec Chris Carter, revient avec une histoire d'horreur corporelle, après son Firewalker qui prenait malin plaisir de dévoiler un champignon qui pousse dans la gorge de ses victimes, avant de la faire exploser. Le script ici nous présente un virus qui prend la forme d'énormes pustules qui émergent sur la peau, puis explosent, libérant ensuite un insecte. Ces deux épisodes figurent parmi les plus cradingues de la saison et ils portent tous deux la marque de Gordon.
Les années 90 ont pas mal vu passer des fictions qui traitaient de la pandémie. On pense notamment au film Outbreak (Alerte!) avec Dustin Hoffman, sorti en 1995 justement, qui évoquait les inquiétudes autour de virus comme Ebola. De surcroît, les préoccupations liées au SIDA étaient encore prégnantes, à l'époque. La production craignait de sortir leur épisode en même temps que le film Outbreak, justement. Mais ils estimèrent que les deux oeuvres étaient suffisamment différentes pour coexister simultanément.
X-Files était vraiment dans l'ère du temps et prenait un malin plaisir à prendre les peurs qui inquiétaient le plus les gens. C'est marrant également de voir à quel point cet opus trouve une résonnance particulière aujourd'hui, après la pandémie du Covid qu'on s'est tapé (et qu'on se tape encore). Bien sûr, la maladie de F. Emasculata est visuellement plus dégueulasse et spectaculaire, car on est dans X-Files après tout. A ce titre, Spotnitz confia que lorsque lui et l'équipe ont vu les pustules explosées, ils ont éclaté de rire. Ils trouvaient le résultat plutôt ridicule. Au final, le public trouva l'effet assez répugnant. Personnellement, ça ne me faisait pas rire non plus, et je continue de trouver ce virus bien dégoutant.

F. Emasculata représente de nouveau cette volonté, lors de ces deux premières saisons, d'intégrer parfois la conspiration dans des événements qui n'ont rien à voir avec les extraterrestres. Ici, nous voyons l'Homme à la Cigarette, représentant du gouvernement, qui débat avec Mulder de l'utilité ou non de cacher au public cette maladie, afin d'éviter un vent de panique. Les arguments du premier arrivent à être pertinents, et ils rejoignent l'avis de Scully dans ce qu'il convient de faire. Finalement, ici, ce n'est pas nécessairement l'antagoniste principal de la série le plus grand ennemi, mais plutôt un laboratoire pharmaceutique privé. C'est lui le coupable de tout le drame qui découle de l'intrigue. X-Files exploite donc à nouveau une peur contemporaine: la méfiance envers Big Pharma. Hé ! La même décennie qui a vu naitre la saga Resident Evil, jeux vidéo qui relatent les méfaits de l'infame boite privée Umbrella Corporation, devenue responsable d'un nombre ahurissants de morts.
Les saisons suivantes seront plus rigides en ce qui concerne les délimitations entre loners et mytharc. Chris Carter préférera ne pas mélanger les deux. La saison 2 marquera donc une des dernières fois où X-Files intègre une figure aussi importante que le Smoking Man dans un épisode indépendant. Il n'y aura que Skinner et les Lone Gunmen qui auront le loisir d'être au casting des deux catégories d'histoires. Bien entendu, à quelques exceptions près, puisque, à de très rares occasions, la série continuera de briser ces frontières bien établies. Je repense tout de suite à Leonard Betts (saison 4) ou encore The Unnatural (saison 6).
Le travail sur la lumière est particulièrement minutieux ici: Le métrage alterne entre les moments action en extérieur, en pleine lumière, et scènes filmées dans la pénombre, comme ce passage dans la cellule du prisonnier qui reçoit ce mystérieux paquet. Même l' Homme à La Cigarette apparaît caché dans l'ombre: Seuls ses yeux apparaissant à la lumière, tel Morticia Addams. 
F. Emasculata est un excellent épisode qui démontre les grandes capacités de l'équipe de production. Une heure haletante d'une tension insoutenable.
A noter l'apparition de Dean Norris qui campe un US Marshall ici, des années avant de devenir un protagoniste important du Breaking Bad de Vince Gilligan... Le même Gilligan qui fera ses premiers pas dans le morceau suivant ! Dingue, non ?



23. SOFT LIGHT (Ombre Mortelle)

Hé oui ! Il s'agit du premier scénario de Vince Gilligan. A l'origine, l'écrivain, encore plutôt novice, était un fan invétéré de la série. Chris Carter l'a connu car les deux hommes avaient un proche en commun. Le nom du scénariste trottait dans un coin de la tête du showrunner, car il avait été impressionné par son script Wilder Napalm, qui avait été porté à l'écran, par la suite. Gilligan et Carter se rencontrèrent dans un hôtel. Le premier confiera l'amour qu'il a pour X-Files, et c'est à ce moment là que, le second, ravi, lui demanda s'il avait une idée d'histoire. L'équipe désirait lr scénario d'un freelance. Elle avait besoin d'un peu de sang neuf et la saison, approchant de la fin, commençait à mettre à rude épreuve la forme de la production. D'autant plus que la saison 2 reste la plus longue jamais produite. Elle compte tout de même 25 épisodes. Le staff n'en pouvait donc plus. C'est lors de cette discussion entre les deux que Gilligan confia à Carter qu'il avait contemplé son ombre, la veille, dans sa chambre d'hôtel, et se dit qu'il serait flippant qu'elle prenne vie. Et c'est comme cela que l'auteur plancha sur son premier scénario pour X-Files. Howard Gordon et Chris Carter durent rafistoler son histoire car, de par l'inexpérience de Gilligan, cette dernière aurait explosé le budget. L'homme fut ravi de pouvoir se rendre à Vancouver et visiter le tournage de la série. Des premières esquisses de son travail de showrunner se sont peut être dessinées à partir de ce moment là.

Au final, Soft Light est un chouette petit épisode de science fiction, qui lorgne vers La Quatrième Dimension. Petit, j'étais fasciné par ce concept d'ombre qui aspire quiconque la toucherait, tel un trou noir. Evidemment, les effets spéciaux font un peu cheapos, et voir ces victimes se faire aspirer par le bas peut faire sourire, surtout aujourd'hui. Cela dit, on a tendance à se montrer clément face à une encore jeune série diffusée sur une petite chaîne. J'adore aussi le drame de ce pauvre scientifique condamné à errer dans une gare, car la lumière de ce lieu public évite à son ombre de se projeter. Et puis, il y a Tony Shalhoub, bien avant son mémorable rôle de Monk. Ici, il campe tout de même le docteur Banton qui, suite à un accident dans son laboratoire hi tech, semble préoccupé et anxieux. L'acteur excellait déjà dans ce genre de rôle. J'adore toujours cette scène, lorsque Chester, enfermé dans une chambre, recule lorsque nos héros s'approchent pour lui parler. Pour être honnête, Soft Light n'est pas le meilleur travail de Vince Gilligan pour la série. C'est un premier essai, mais je ne peux m'empêcher d'avoir beaucoup d'affection pour cet épisode, rarement cité parmi les préférés des fans. La musique de Mark Snow se lâche également avec un motif musical très distinctif. C'est surtout tout ce qui tourne autour du personnage de Tony Shalhoub qui m'a plu. Le reste n'en reste pas moins intéressant, mais pas forcément plus développé que ça. Par exemple, l'intégration de l'inspecteur Ryan n'est pas mauvais, mais elle ne débouche que sur une vague trahison. En revanche, je trouvais ça plutôt pertinent de dresser un parallèle entre elle et notre héroïne. Lorsqu'on regarde Ryan, on ne peut s'empêcher de repenser à la Scully inexpérimentée des tous débuts. On discerne le chemin qu'elle a parcouru, et la confiance acquise. Impossible de passer sous silence cette référence à Tooms, lorsque Scully, sur les lieux d'une disparition, regarde attentivement une grille de ventilation. X-Files faisaient très timidement des allusions parfois à des événements de la mythologie dans des loners, à l'instar de Firewalker. Parfois, des loners étaient intégrés au fil rouge, comme pour Tooms, ainsi que l'introduction de la saison 2, composée de trio The Host, Blood et Sleepless. Mais qu'un épisode isolé fasse mention d'un "monstre de la semaine" issu d'un autre opus est une première.

Soft Light change quelque peu de direction dans sa seconde partie: On passe d'une histoire traitant d'un pauvre scientifique qui galère à gérer son ombre mortelle à un thriller paranoïaque qui revient au gouvernement secret qui cherche à s'emparer de l'homme et de ses recherches. C'est à ce moment là que Mr X prend de l'importance en trahissant Mulder et en kidnappant Banton, donnant de faux airs à EBE à l'ensemble.
C'est toujours cool d'avoir plus de Mr X, car Steven Williams est toujours convaincant dans son rôle d'informateur colérique et désagréable. L'image finale reste aussi un grand moment: lorsqu'on voit ce pauvre Banton, attaché à un chaise, se faire bombarder de flash lumineux. Une conclusion terrible.
Définitivement, Soft Light ne compte pas parmi les sommets de cette saison, mais il constitue un chouette et solide épisode de fin d'année. Il y a trop d'éléments à apprécier ici pour le balayer d'un revers de la main. 



24. OUR TOWN (Une Petite Ville Tranquille)

Je me souviens la première fois que j'ai vu cet épisode: Le pré-générique était tellement peu inspiré et semblait si banal que j'avais presque peur de la suite. Our Town se déploie véritablement dans sa seconde partie, lorsque l'intrigue en révèle de plus en plus sur le sombre secret que cache la petite ville de Dudley. En fait, la première partie reste assez floue, mais c'est pour mieux faire monter la tension au fur et à mesure, afin d'arriver au point culminant. Après avoir enquêter sur une disparition, d'étranges descriptions de feux follets, puis sur deux personnes ayant sombré dans la démence lié à la maladie de Creutzfeldt-Jakob, Mulder et Scully vont déterrer le lourd secret de cette communauté: à savoir qu'elle pratique le cannibalisme. La révélation est assez surprenante et un second visionnage soutient une nouvelle saveur à l'ensemble. J'ai apprécié Our Town au fur et à mesure. Il est un exemple type de l'épisode qui se bonifie avec les années. Frank Spotnitz, qui signait là son premier loner, a un ressenti similaire: à savoir qu'il l'apprécie davantage au fil du temps.
Le twist nous apprend que tout le monde est coupable, constituant une chouette révélation: Que cette petite ville dévore les gens venus de l'extérieur dans le but d'avoir une longévité exceptionnelle. Le parallèle avec l'usine de poulets est plutôt rigolote: ici, les agents apprennent vite que la volaille est nourri avec des restes de morceaux de leurs congénères.
Même si l'enquête met du temps à décoller, il y a des scènes chocs qui fonctionnent assez bien, à l'instar du passage où Mulder découvre diverses têtes humaines dans un placard de Chaco, le chef de cette communauté. Our Town est étonnant aussi car l'intrigue met en lumière le nombre hallucinant de disparitions autour de Dudley: Nos deux agents feront l'effroyable découvertes d'un gros tas d'ossements dans une rivière. Après comptage, ils constateront qu'il y a là plus de 80 squelettes. Un body count impressionnant pour un épisode.

X-Files aime les coins perdus où des villages s'éloignent volontairement de la mondialisation. Ces petites villes excentriques, presque figées dans le temps, à l'abris des regards, et où il se passe des choses mystérieuses. Très souvent dans ce genres de récits, c'est l'arrivée de Mulder et Scully qui viennent perturber cette "tranquillité", en forçant parfois les habitants à se remettre en question. Gender Bender, Blood, Red Museum et même Humbug puisent dans ces thématiques. La série continuera d'explorer ces petits coins isolés, en voie d'extinction, dans de nombreux autres épisodes; à l'instar de Home (saison 4) ou bien Roadrunners (saison 8).
Il y a très longtemps, j'avais lu un texte analytique qui soulignait qu'Our Town est intéressant, car il présente un patriarche blanc qui se réapproprie des rites de cannibales, pour ensuite les déformer pour ses propres intérêts. Créant ainsi un parallèle à Fresh Bones, lorsque Wharton subvertit du vaudou pour arriver à ses propres fins.
Il est amusant de constater que la diffusion de l'épisode a précédé toute la panique qu'il y a eu autour de la vache folle. L'actualité sur cette maladie se situe véritablement en 1996. 
Même si j'apprécie Our Town, difficile de ne pas lever les yeux au ciel lorsque, lors du climax, Scully se fait enlever par les habitants de Dudley. Autant, on pouvait rationnaliser et expliquer le fait qu'elle se fasse maltraiter par Donnie Pfaster, au terme d'Irresistible, autant cela semble totalement gratuit ici. 
Oui, la fragilité de Scully, au cours de cette saison 2, est clairement thématique. Mais je reconnais volontiers qu'elle est assez régulièrement dans la position de victime, tout au long de cette année. Si on observe un peu le bilan: elle se fait enlever dans Duane Barry, pour revenir dans One Breath. Elle se refait enlever dans Irresistible, mais aussi dans Colony/End Game pour servir de monnaie d'échange. Sans oublier qu'elle se fait malmener par Michael à la fin de The Calusari. Cela fait beaucoup. Certains fans ont critiqué cette facette et la mettre dans cette situation dans Our Town a été la goutte d'eau de trop. L'équipe créatrice a entendu ces plaintes et rectifiera le tir pour la suite. Pourtant, la série nous avait déjà démontré qu'elle était capable de placer Scully dans le rôle de "sauveuse", et ce dès le deuxième opus de la première année.
Our Town est au final un bon segment d'une longue saison 2 plutôt solide. A ce moment là, même Rob Bowman, le réalisateur, avouera avoir été très fatigué, lors du tournage de l'épisode.



25. ANASAZI (Anasazi)

Et voilà le grand final de la saison 2: Le fabuleux Anasazi qui ouvre en réalité une trilogie d'épisodes se concluant au début de la saison 3. Donc, comme il est maintenant de tradition, les saisons se clôturent et s'ouvrent sur du mytharc. Anasazi constitue l'aboutissement de cette superbe saison 2, comme a pu être The Erlenmeyer Flask pour la saison 1. On apprend beaucoup de choses ici. Rétrospectivement, les spectateurs ont pu être très frustré par l'épisode car, comme il sera de coutume, on a la sensation que les réponses ici débouchent sur bien plus de questions. Mais lorsqu'on connait les tenants et aboutissants de la mythologie, on se rend compte que la trilogie Anasazi met en lumière énormément d'éléments importants. Cet ultime histoire fait intervenir bon nombres de têtes connues, dont L'Homme à La Cigarette, Alex Krycek, Walter Skinner, les Lone Gunmen, et même papa Mulder. A ce titre, une des plus grandes révélations concerne l'implication de ce dernier dans la grande conspiration. On apprend qu'il est lié au Smoking Man et qu'il a probablement les mains sales. Et cette réponse change radicalement la place qu'occupe Fox Mulder dans ce complot. En effet, jusqu'ici, il était dépeint comme un type random qui voulait débusquer des preuves de l'existence d'une vie extraterrestre, mais aussi mettre au grand jour les agissements du gouvernement qui cache ce secret. A partir de ce final, il devient un élément central de cette conspiration. Son propre père est impliqué, et il aura la tâche de découvrir quel rôle joue sa propre famille au milieu de tout ça. David Duchovny , lui même crédité au scénario aux côtés de Chris Carter, fut intéressé pour que son personnage devienne une sorte "d'élu", et ainsi rejoindre un certain nombre de héros archétypaux relatés par Joseph Campbell. A partir d'ici, le développement de Mulder adoptera une autre vision. Il restera toujours ce type qui court après des aliens, mais il ne demeurera plus quelqu'un d'anonyme au sein de cette grande histoire. Cette orientation apportera de nouvelles perspectives à la mythologie.
En outre, impliquer son père délivre de la crédibilité sur le fait que l'Homme à La Cigarette et ses collègues n'osent pas tuer l'agent du FBI. A partir de tout ce qui tourne autour de Bill Mulder, X-Files explorera la culpabilité héritée: En révélant le complot, Mulder dénoncera également son père, comme le suggère l'Homme A La Cigarette ici.

Anasazi est un season final qui amène le héros à bout de force: sa paranoïa arrive à un degré tel qu'il frappe son supérieur, et ne fait plus confiance en sa partenaire; La seule personne en qui il avait foi. Le comportement de Mulder dans ce récit atteint un tel point de rupture qu'on se demande s'il va pouvoir se relever. Voir cette confiance mutuelle se briser est un moment particulièrement tendu. Justement, c'est globalement Scully qui protégera ce dernier dans une bonne portion de l'histoire. Un joli renversement après des mois à avoir été la demoiselle en détresse. 
Anasazi étend la conspiration à un niveau international. Elle n'est plus cantonnée qu'aux Etats-Unis. On aperçoit ici que d'autres pays sont au courant de tous ces secrets. Chris Carter semble tout démolir ici pour mieux reconstruire dans la saison 3. D'ailleurs, le showrunner apparaît même dans l'épisode sous les traits d'un supérieur qui interroge Scully. Il lui rappelle même sa fonction première qui était alors de démystifier le travail de Mulder. Un rappel presque symbolique, quant on voit le chemin qu'a parcouru la série, et le nouveau visage du mytharc.
Anasazi intègre les amérindiens majorant l'aspect atmosphérique de l'ensemble. Malheureusement, des critiques pointèrent l'utilisation des navajos afin de distiller du mysticisme au récit, et donc d'avoir tendance à stéréotyper ce peuple. Ce sera encore plus flagrant dans The Blessing Way, l'ouverture de la troisième saison. Cependant, Chris Carter demandera conseil aux concernés pour adoucir cet aspect pour Paper Clip, le troisième segment de cette trilogie d'épisodes.
Le travail de R.W Goodwin est remarquable ici: Tout va tellement vite, à l'instar de son travail dans The Erlenmeyer Flask. Chaque scènes s'enchaînent et on croule sous les rebondissements. Il y avait même moyen de scinder tous ces événements en deux parties distinctes. Mais non, Goodwin arrive à tout condenser, mais sans non plus rendre l'ensemble indigeste. C'est copieux, mais on n'a pas envie de vomir à la fin.

Et puis, il y a cette conclusion où l'on se demande si Mulder est mort ou pas. C'est évidemment un classique du cliffhanger, mais la séquence arrive au terme d'une multitude de rebondissements, comme la cerise sur le gâteau. L'effet fonctionne. A tel point que de nombreux téléspectateurs ont spéculé tout l'été sur ce qui allait advenir ensuite. La cristallisation de ces discussions, en ligne ou IRL, ont finit de consolider X-Files au rang de série incontournable. De plus en plus de gens commençaient à parler des aventures de Mulder et Scully. Elle deviendra très vite un phénomène culturel lors de la prochaine saison.
Moi, comme j'étais une sorte d'oracle, je connaissais déjà la suite car j'avais acheté la toute première VHS de la série intitulée "Les Dossiers Secrets", qui incluait Anasazi, The Blessing Way et Paper Clip. Du coup, je pouvais déjà spoiler mes camarades français sur la suite des événements. La numérotation de ces cassettes étaient étranges, car la seconde sortie a été le diptyque Tooms (comme mentionné dans mon précédent article). Ce n'était pas bien problématique étant donné qu'il s'agissait deux loners, mais cela deviendra plus cocasse par la suite, surtout pour la troisième vidéo, "L'Enlèvement", qui inclue Duane Barry, Ascension et One Breath. Il y avait encore pire avec la parution de "La Colonie" (Colony/End Game) où l'on voyait Bill Mulder revenir d'outre tombe.

L'équipe créatrice a encore tenté quelques expérimentations, avec peu de ratés, mais on la sent nettement plus en confiance, tout du long de cette saison 2, et malgré un début d'année chaotique. Cette saison mouvementée aura tracé la voie que la série allait suivre pendant très longtemps.
On se retrouve pour le prochaine article dédié à la... saison 3 oui voilà. Tu suis bien !

PS: Pour mes écrits, je m'appuie énormément sur tous les textes que j'ai pu lire depuis mon adolescence. Il y a de nombreux éléments que je tire de magazines (comme Mad Movies, Generations Series ou encore le magazine X-Files), mais aussi de tous les livres que j'ai pu acheter, notamment les guides officiels et même non-officiels. Par la suite, j'ai pu lire de nombreux dossiers ou articles rétrospectifs sur internet qui ont parfois étudié la série.

Moggy


https://www.richbrix.co.uk/lego-gifts/x-files-the-host/


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